Aharon Appelfeld (en hébreu : אהרן אפלפלד), né Ervin Applefeld le à Jadova, près de Czernowitz (alors Cernăuți en Royaume de Roumanie) et mort le à Petah Tikva en Israël[1],[2], est un romancier et poète israélien. Il est considéré comme un des plus importants écrivains israéliens de langue hébraïque de la fin du xxe siècle. Il a reçu de nombreux prix littéraires, dont le prix Israël en 1983 et le prix Médicis étranger en 2004[3].
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Aharon Appelfeld est né le en Roumanie de parents juifs assimilés germanophones, parlant aussi le ruthène, le français et le roumain. Il vit d'abord une petite enfance heureuse, entre une mère tendre, un père plus lointain, et des séjours à la campagne auprès de ses grands-parents qui lui apprennent le yiddish[réf. nécessaire]. Sa mère est tuée en 1940 alors que le régime roumain commence sa politique meurtrière envers les Juifs. Le nord de la Bucovine, dont Czernowitz, est annexé en par l’Union soviétique en conséquence du pacte Molotov-Ribbentrop, avant d’être occupé par la coalition germano-roumaine en 1941. Aharon Appelfeld connaît le ghetto, puis la séparation d'avec son père et la déportation dans un camp à la frontière ukrainienne, en Transnistrie, en 1941. Aharon Appelfeld parvient à s'évader à l'automne 1942. Il se cache dans les forêts d'Ukraine pendant plusieurs mois au milieu de marginaux de toutes sortes. Il trouve refuge pour l'hiver chez des paysans qui lui donnent un abri et de la nourriture contre du travail, mais il est obligé de cacher qu'il est juif. Dans Histoire d'une vie, il explique :
« Plus de cinquante ans ont passé depuis la fin de la Seconde Guerre mondiale. Le cœur a beaucoup oublié, principalement des lieux, des dates, des noms de gens, et pourtant je ressens ces jours-là dans tout mon corps. Chaque fois qu'il pleut, qu'il fait froid ou que souffle un vent violent, je suis de nouveau dans le ghetto, dans le camp, ou dans les forêts qui m'ont abrité longtemps. La mémoire, s'avère-t-il, a des racines profondément ancrées dans le corps. Il suffit parfois de l'odeur de la paille pourrie ou du cri d'un oiseau pour me transporter loin et à l'intérieur. »
Il est ensuite recueilli par l'Armée rouge pendant neuf mois[1]. Il traverse l’Europe pendant des mois avec un groupe d’adolescents orphelins, arrive en Italie et, grâce à une association juive, s’embarque clandestinement pour la Palestine où il arrive en 1946.
Le jeune garçon est pris en charge par l’Aliyat Hanoar (en) — mouvement sioniste fondé en 1933 en Allemagne et dont l'objectif est de sauver de jeunes juifs en les envoyant en Palestine — et se retrouve dans un camp de jeunesse, puis dans une école agricole. Il doit faire ensuite son service militaire en 1949. Il tient épisodiquement pendant ces années un journal qui reflète sa difficulté à se reconstruire. Il se heurte aussi au problème du rapport à la langue : il est en effet passé, sans espoir de retour, de l'allemand et du yiddish, à l'hébreu. C'est principalement en recopiant des passages de la Torah qu'il apprend à écrire et parler l'hébreu, alors que ses parents n'étaient pas religieux[4].
Il est diplômé de l'université hébraïque de Jérusalem : il y renoue avec sa culture d'origine, en étudiant au département de yiddish. Ses professeurs sont Martin Buber, Gershom Scholem, Ernest Simon, Yehezkiel Kaufmann (en). Comme lui, ils ont une double culture.
Sa rencontre avec Samuel Joseph Agnon le convainc que « le passé, même le plus dur, n’est pas une tare ou une honte mais une mine de vie ». À la fin des années 1950, il décide de se tourner vers la littérature et se met à écrire, en hébreu, sa « langue maternelle adoptive »[5]. Il enseigne la littérature à l'université Ben Gourion du Néguev de 1979 jusqu'à sa retraite[6]. Homme de gauche, de tout temps ancré dans le Parti travailliste, il observe avec amertume l'impasse d'un certain sionisme et le rejet du monde arabe qui veut supprimer son pays.[réf. souhaitée] Il voit s'élargir les failles dans la société israélienne. Aharon Appelfeld est marié à Judith, Juive argentine, et a trois enfants, Meir, Yitzak et Batya.
En 1957, il retrouve son père qui a lui aussi survécu à la Shoah[6].
En 2005, il reçoit le Prix Nelly-Sachs.
Il meurt le à l’âge de 85 ans.
Aharon Appelfeld a écrit plus de 40 livres, principalement des recueils de nouvelles et des romans. Il a appris l'hébreu à l'adolescence, sa langue maternelle est l'allemand. Appelfeld fait souvent ce cauchemar : « Parfois je me réveille avec l'angoisse que cet hébreu acquis avec tant de peine disparaît. Je veux l'attraper, je ne peux pas. »[réf. nécessaire]
La majorité de ses écrits concerne la vie de la population juive en Europe avant et durant la Seconde Guerre mondiale. Il y livre à chaque fois un pan de sa propre vie. Ses héros sont des Juifs assimilés. Pour montrer l'écroulement du monde autour de ses personnages il décrit un monde d'inquiétante étrangeté, d'espaces qui se rétrécissent, d'horaires qui se dérèglent, de trains sordides qui roulent dans des paysages indistincts. Il évoque en particulier sa propre expérience de survie dans la forêt de Bukovine, alors âgé d'une dizaine d'années seulement, qui peut se retrouver dans certains de ses livres comme Tsili ou L'Amour, soudain. Aharon Appelfeld décrit aussi des rescapés incapables de se libérer d’un passé douloureux qui les poursuit, incapables de se forger une vie nouvelle. Il refuse cependant d'être considéré comme un écrivain de la Shoah : « Je ne suis pas un écrivain de l'Holocauste et je n'écris pas sur cela, j'écris sur les hommes juifs. »[réf. nécessaire]
Appelfeld est également l'ami de l'écrivain américain Philip Roth, et apparaît dans un de ses romans (Opération Shylock). Pour Roth, ce qu'Appelfeld nous apprend de la nature humaine est à la hauteur littéraire de Franz Kafka et de Bruno Schulz. Les écrivains qui ont influencé Appelfeld sont Kafka, Proust et Tchekhov et sur le plan esthétique surtout la Bible.
Valérie Zenatti est la traductrice des romans d'Appelfeld en français. Elle noue une relation amicale forte avec l'auteur et publie en 2019 un essai sur celle-ci : Dans le faisceau des vivants[7].
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