music.wikisort.org - Poète

Search / Calendar

Fabian Avenarius Lloyd dit Arthur Cravan, né le à Lausanne (Suisse) et disparu vraisemblablement dans le golfe de Tehuantepec, au large de Salina Cruz (Mexique), en , est un poète et boxeur helvético-britannique de langue française.

Arthur Cravan
Arthur Cravan en 1908.
Biographie
Naissance

Lausanne ( Suisse)
Disparition
(à 31 ans)
Décès
Rio Grande ( Mexique)
Nom de naissance
Fabian Avenarius Lloyd
Pseudonyme
Arthur Cravan
Nationalités
Britannique
Française
Activités
Boxeur, poète, écrivain
Père
Otho Holland Lloyd
Mère
Clara St. Clair Hutchinson (d)
Fratrie
Conjoint
Enfant
[Jemima] Fabienne Cravan (d)
Autres informations
Sport
Boxe

Considéré, tant par les dadaïstes que par les surréalistes comme un des précurseurs de leurs mouvements, Arthur Cravan a provoqué le scandale partout où il est passé.


Biographie



Origines


Il naît Fabian Avenarius Lloyd, de Clara St-Clair Hutchinson (dite Nellie, morte en 1934) et d'Otho Holland Lloyd (1856-1930), fils d'Horace Lloyd (1829-1874), conseiller de la reine Victoria. Son frère aîné, Otho Lloyd (1885-1979), devient peintre[1]. Il est par ailleurs le neveu par alliance d'Oscar Wilde qui avait épousé Constance Mary Lloyd, la sœur d'Otho, en 1884. Il est l'arrière-petit-fils de John Horatio Lloyd.


Paris


Fabian en jeune boxeur mi-lourd (La Vie au grand air, mars 1910).
Fabian en jeune boxeur mi-lourd (La Vie au grand air, mars 1910).

Son arrivée à Paris date de l'hiver 1908. Il s'établit d'abord dans un hôtel rue Delambre, puis il loue un appartement au 67, rue Saint-Jacques, qu'il conserve jusqu'en 1915. Son café préféré est La Closerie des Lilas[1].

Le , Fabian produit en une de L'Écho des sports un texte intitulé « To be or not to be… American », fruit de son voyage aux États-Unis[2],[3].

À compter de , la presse sportive parisienne mentionne régulièrement les noms d'Otho et Fabian Lloyd, en tant que jeunes boxeurs suisses, catégorie mi-lourd. On trouve des comptes rendus de matchs dans L'Auto, La Boxe et les boxeurs et L'Éducation physique. Dans La Vie au grand air de mars, l'on apprend qu'il a battu un certain Pecqueniaux par abandon de ce dernier, qui ne s'est pas présenté : il est déclaré champion de France des mi-lourds dans sa catégorie, sans avoir combattu. Entraîné par Fernand Cuny, les deux frères font alors partie de l'équipe du Club pugiliste de Paris, qui était chargée par la Fédération française des sociétés de boxe d'organiser les combats de novices[2]. Après le mois de mai, Fabian cesse les combats.

En 1912, il choisit le pseudonyme de « Cravan » probablement en hommage à sa fiancée d'alors, la Française Renée Boucher, née à Cravans, en Charente-Maritime.

Entre et , à Paris, il est l'éditeur et le rédacteur unique de la revue Maintenant, dont il produit cinq numéros, mêlant critiques littéraires et artistiques aux excentricités et provocations de toutes sortes.

Dans un article publié dans le no 2 de Maintenant, daté de , Cravan fait une description iconoclaste de sa visite chez André Gide :

« Monsieur Gide n'a pas l'air d'un enfant d'amour, ni d'un éléphant, ni de plusieurs hommes : il a l'air d’un artiste ; et je lui ferai ce seul compliment, au reste désagréable, que sa petite pluralité provient de ce fait qu'il pourrait très aisément être pris pour un cabotin. Son ossature n'a rien de remarquable ; ses mains sont celles d'un fainéant, très blanches, ma foi ! Dans l'ensemble, c'est une toute petite nature. »

En 1932, André Breton affirme dans une lettre qu'André Gide ne se releva jamais de ces quelques pages de critique désinvolte[4].

Dans le no 4 de cette revue, ayant insulté la peintre Marie Laurencin, il y publie le rectificatif suivant :

« Puisque j'ai dit : “En voilà une qui aurait besoin qu'on lui relève les jupes et qu'on lui mette une grosse … quelque part”, je tiens essentiellement qu'on comprenne à la lettre : “En voilà une qui aurait besoin qu'on lui relève les jupes et qu'on lui mette une grosse astronomie au Théâtre des Variétés”. »

Plus loin, dans ce même article, portant sur « L'Exposition des Indépendants », Cravan s'en prend à tous les peintres qu'il estime médiocres et aussi à Guillaume Apollinaire qui, par la suite, lui envoie ses témoins.

Toujours à Paris, Cravan annonce son suicide public, l'auditorium étant rempli de curieux. Il les accuse alors de voyeurisme puis fait une conférence exceptionnellement détaillée de trois heures sur l'entropie.


Barcelone et la boxe


Cravan pose pour le magazine espagnol Stadium (avril 1916).
Cravan pose pour le magazine espagnol Stadium ().
Reproduction de l'affiche du combat entre Arthur Cravan et Jack Johnson à Barcelone, le 26 avril 1916.
Reproduction de l'affiche du combat entre Arthur Cravan et Jack Johnson à Barcelone, le .

En 1915, il quitte la France en guerre et traverse l'Europe entière, muni de faux passeports, avant de trouver refuge à Barcelone en 1916, où il renoue avec la boxe en organisant un combat le au Plaza de Toros Monumental avec le champion du monde Jack Johnson qui le met KO au bout de 43 minutes au 6e round[5]. Pour Bertrand Lacarelle, ce combat est en quelque sorte le premier « happening », la première « performance » de l'histoire de l'art[6]. Un autre combat a lieu le suivant, cette fois au Frontón Condal de Barcelone contre le Français Franck Hoche (mort en 1964), mais ne dure qu'un round, Cravan s'étant présenté ivre est déclaré forfait[7].


États-Unis, Mexique : la rencontre avec Mina Loy


Invité en 1917 par Francis Picabia et Marcel Duchamp[8] à donner une conférence à la Grand Central Gallery sur les artistes indépendants de France et d'Amérique, Arthur Cravan s'embarque ensuite pour New York. Mais, entré dans la salle chancelant et visiblement ivre, il tape du poing sur la table et commence à se dévêtir. Il est emmené menotté et traîné par les policiers en criant son indignation, selon le témoignage d'Henri-Pierre Roché, qui assiste à la scène avec ses amis Duchamp et Picabia[9]. Le lendemain, la presse new-yorkaise, tout en le blâmant, se montre pourtant compréhensive : « Monsieur Cravan était vraiment un peu fou, mais il était aussi sans doute indépendant. Or, le sujet de la conférence n'était-il pas l'indépendance des artistes ? »[10],[11].

La revue 391 lancée par Picabia en à Barcelone doit sans doute beaucoup à l'esprit de Cravan : la filiation entre lui et Dada s'y inscrit à partir de ce moment-là, mais Cravan n'a jamais formellement adhéré à ce mouvement.

Lors d'une soirée chez les époux Arensberg à Manhattan, il fait la connaissance de la poétesse Mina Loy, avec qui il commence à vivre une intense passion. En , elle le rejoint à Mexico où ils se marient en avril.

En , l'entrée en guerre des États-Unis, l'avait poussé, avec Mina Loy, à chercher l'asile du côté du Mexique, puis c'est l'Argentine qui tente le couple. Ils préparent leur voyage à la fin de l'été 1918, du moins c'est ce qu'il écrit dans une ultime lettre à sa mère Nellie le .

Le , il participe en tant que Suisse, à son dernier combat de boxe, à la Plaza de Toros, à Mexico, contre l'Américain Jim Smith, qu'il perd en deux rounds.

Le , le magazine mexicain Arte y deportes annonce un nouveau match de boxe entre Cravan et Smith, cette fois à Veracruz, mais qui n'a pas lieu, le couple se trouvant alors dans l'impossibilité d'embarquer depuis le port de Veracruz pour Buenos Aires, et ce, pour une raison inconnue. Ils repartent cette fois pour la Côte pacifique, et atteignent Salina Cruz. Mina Loy, enceinte et fragile, embarque seule à bord d'un navire sanitaire japonais en direction de la capitale argentine où ils se donnent rendez-vous.

Selon un ami témoin appelé Owen Cattell, un pacifiste et déserteur américain, dans une lettre dont l'original n'a pas été retrouvé, Arthur Cravan aurait ensuite embarqué de son côté, sur un bateau qu'il aurait acheté à Puerto Ángel, mais devant rallier Salina Cruz par gros temps pour retrouver deux marins et Cattell, aurait disparu dans l'isthme de Tehuantepec, durant la forte tempête qui dura plusieurs jours, vraisemblablement au début du mois de  : après cette date, on perd totalement toute trace de lui. Son corps n'a jamais été retrouvé. Mina Loy se lance alors dans une enquête à travers le monde jusqu'en . La police mexicaine aurait fait état de deux corps d'hommes abattus près de la frontière américaine, au bord du Rio Grande del Norte ; le signalement de l'un d'eux, cheveux blond cendré et de très grande taille (Cravan mesurait près de 2 mètres et pesait plus de 100 kilos), pouvait correspondre à celui de Cravan[12]. L'une des questions que posa son frère Otho, qui crut longtemps que son frère avait fui ses devoirs de père, est : pourquoi, en plein conflit, son frère voulait-il passer par le canal de Panama pour rejoindre Buenos Aires quand il n'avait aucun passeport en règle sur lui et qu'il était recherché pour ses activités de pacifiste[1] ?

Prenant pour modèle son mari disparu, Mina Loy commence un roman, Colossus, resté inachevé. De leur union est née en Grande-Bretagne, le , leur fille unique Jemima Fabienne Benedict qui se suicide en 1997. Les descendants d'Arthur Cravan vivent aujourd'hui à Aspen dans le Colorado.


Postérité


André Breton accorde une grande importance historique à la revue Maintenant pour avoir été la première dans laquelle certaines préoccupations extra-littéraires et même anti-littéraires ont pris le pas sur les autres[4] : il affirme dans son Anthologie de l'humour noir qu'il est impossible de ne pas découvrir en Cravan les signes annonciateurs de Dada. Philippe Squarzonni, Sébastien Montag et Paskua se réclament de sa filiation.

Arthur Cravan a entraîné depuis les années 1970 une abondante littérature autour de sa personnalité. Dans une œuvre de fiction parue en 2006, le critique d'art Philippe Dagen va jusqu'à imaginer la « suite » de la vie d'Arthur Cravan, supposant qu'il ne serait pas mort en 1918.


Réception critique



Citations



Publications


Page titre de Maintenant, avril 1912.
Page titre de Maintenant, .

Revue Maintenant


Arthur Cravan est le directeur de publication et le principal rédacteur de cette revue qui compte cinq livraisons entre et .

À la fin du no 5 est annoncé un no 6, jamais paru, « à lire dans un an » avec au sommaire deux titres de poésie, « Les Tricots » et « Atmosphériques de la Morte de Couleur à Tahiti ».


Publications posthumes



Notes et références


  1. « Chronologie », dans Maria Lluïsa Borràs, Cravan, une stratégie du scandale, Paris, Jean-Michel Place, 1996, pp. 361-364.
  2. « Bibliographie », dans Maria Lluïsa Borràs, op. cit., pp. 373-374.
  3. La page du journal et le texte est publiée dans (en) Dafydd Jones (sous la direction), Dada Culture: Critical Texts on the Avant-Garde, collection « Avant-Garde Critical Studies » no 18, Amsterdam/NewYork, Éditions Rodopi, 2006, p. 201.
  4. André Breton, lettre du à R. Gaffé, reproduite in: Arthur Cravan, Œuvres, éd. Gérard Lebovici.
  5. Arthur Cravan, Œuvres, Éditions Ivrea, 1992, p. 273.
  6. Bertrand Lacarelle, « Arthur Cravan, un poète sur le ring », lefigaro.fr, .
  7. Roselee Goldberg (trad. de l'anglais), La Performance : Du futurisme à nos jours, Londres/Paris, Thomas & Hudson / L'univers de l'art, 256 p. (ISBN 978-2-87811-380-8, BNF 42605398), Chapitre 3 / Dada : Dada à New York et à Barcelone.
  8. Document autographe in: Maria Lluïsa Borràs, infra, p. 372.
  9. Danielle Régnier-Bohler et Jean Clair (édition et notes), « Victor » (1958) in: Catalogue de l'exposition Marcel Duchamp, Paris, Centre Pompidou, 1977 volume IV, pp. 58-59.
  10. The Sun, .
  11. Fernando Couto e Santos, laplumedissidente.blogspot.fr.
  12. Repères biographiques, dans Arthur Cravan, Œuvres. Poèmes, articles, lettres, édition établie par Jean-Pierre Begot, Paris, Éditions Ivrea, 1992, p. 278.
  13. Sur Arthur Cravan, andrebreton.fr.
  14. Dès sa première œuvre publique (1952), son film Hurlements en faveur de Sade, Guy Ernest Debord évoque la figure d'Arthur Cravan, que ce soit au tout début de la première version du scénario (jamais tourné) que dans sa version définitive (p. 64 des Œuvres publiées chez Quarto Gallimard en 2006.
  15. Philippe Sollers, « Portrait d'un rebelle », Le Monde, (ISSN 1950-6244, lire en ligne).
  16. Œuvres. Poèmes, articles, lettres, Paris, Éditions Ivrea, 1992, p. 93.
  17. Œuvres. Poèmes, articles, lettres, Paris, Éditions Ivrea, 1992, p. 33.
  18. Œuvres. Poèmes, articles, lettres, Paris, Éditions Ivrea, 1992, p. 69.
  19. Œuvres. Poèmes, articles, lettres, Paris, Éditions Ivrea, 1992, p. 50.

Annexes


Sur les autres projets Wikimedia :


Bibliographie critique



Monographies, dossiers, documents inédits



Articles, anthologies, essais



Publications et travaux d'imagination et d'adaptation



Articles connexes


Il existe une catégorie consacrée à ce sujet : Anarchisme en Suisse.

Liens externes



На других языках


[en] Arthur Cravan

Arthur Cravan (born Fabian Avenarius Lloyd;[2] 22 May 1887 – disappeared 1918) was a Swiss writer, poet, artist and boxer. He was the second son of Otho Holland Lloyd and Hélène Clara St. Clair. His brother Otho Lloyd was a painter and photographer married to the Russian émigré artist Olga Sacharoff.[3] His father's sister, Constance Mary Lloyd, was married to Irish poet Oscar Wilde.[4] He changed his name to Cravan in 1912 in honour of his fiancée Renée Bouchet, who was born in the small village of Cravans in the department of Charente-Maritime in western France.[citation needed]

[es] Arthur Cravan

Arthur Cravan (seudónimo de Fabien Avenarius Lloyd; 22 de mayo de 1887, Lausana (Suiza) - 1918, océano Atlántico) fue un artista multidisciplinar, considerado un precursor del dadaísmo. Era hijo de Otho Holland Lloyd y sobrino político de Oscar Wilde, que se había casado en 1884 con Constance Mary Lloyd, hermana de Otho.
- [fr] Arthur Cravan

[ru] Артюр Краван

Артюр Краван (фр. Arthur Cravan; 22 мая 1887, Лозанна, Швейцария — исчез в Салина-Крус в 1918 году[1]) — швейцарский писатель, поэт, художник и боксёр. Настоящее имя — Фабиан Авенариус Ллойд (фр. Fabian Avenarius Lloyd). Последний раз Кравана видели в Салина-Крус (Мексика) в 1918 году; скорее всего, он утонул в Тихом океане у побережья Мексики.



Текст в блоке "Читать" взят с сайта "Википедия" и доступен по лицензии Creative Commons Attribution-ShareAlike; в отдельных случаях могут действовать дополнительные условия.

Другой контент может иметь иную лицензию. Перед использованием материалов сайта WikiSort.org внимательно изучите правила лицензирования конкретных элементов наполнения сайта.

2019-2024
WikiSort.org - проект по пересортировке и дополнению контента Википедии