Elke Erb (Rheinbach, ) est une autrice et poétesse allemande. Elle a également travaillé comme directrice littéraire et traductrice. Elle vit à Berlin[1],[2],[3].
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Berlin, Wuischke (d) ![]() |
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Ewald Erb (d) ![]() |
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Ute Erb (en) ![]() |
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Adolf Endler (de à ) ![]() |
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Konrad Endler (d) ![]() |
Membre de | |
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Distinctions |
Prix Georg-Büchner () ![]() Liste détaillée Prix Peter-Huchel () Prix Heinrich-Mann () Médaille Rahel-Varnhagen-von-Ense (d) () Prix Erich-Fried () Ida-Dehmel-Literaturpreis (en) () F.-C.-Weiskopf-Preis () Hans-Erich-Nossack-Preis (en) () Erlanger Literaturpreis für Poesie als Übersetzung () Preis der Literaturhäuser (en) () Prix Georg-Trakl () Prix Roswitha (en) () Ernst-Jandl-Preis () Mörike-Preis der Stadt Fellbach () Prix Georg-Büchner () ![]() |
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Elke Erb est née à Scherbach (qui fait aujourd'hui partie de Rheinbach) dans les collines au sud de Bonn, en Rhénanie.
Ewald Erb (1903–1978), son père, a travaillé au bureau local des impôts après avoir perdu son poste universitaire d'historien littéraire marxiste[2] à l'Université de Bonn en 1933 en raison d'«activités communistes». Sa mère Elisabeth était ouvrière agricole. Elke était l'aînée d'une sororie de trois filles, toutes nées à Scherbach entre 1938 et 1941, lorsque son père fut enrôlé par la conscription. La plus jeune des trois sœurs est la poétesse Ute Erb (de)[4].
Pendant ses années de conscriptions, Ewald Erb fut accusé d'une forme de sédition (Wehrkraftzersetzung) et devint prisonnier de guerre. La famille ne sera réunie qu'en 1949 lorsqu'il s'organisa pour que sa femme et ses filles puissent le rejoindre à Halle, dans la zone d'occupation soviétique. Arrivé directement là-bas en 1947 depuis un camp de prisonniers de guerre britannique, Ewald Erb travaillait déjà à l'université de Halle depuis deux ans lorsque la famille fut réunie. De la fin de la guerre jusqu'en 1947, la famille Erb croyait qu'Ewald ne reviendrais jamais et qu'il resterait porté disparu pour toujours.
La vie à Halle était difficile pour la famille Erb. Ewald louait un logement constitué d'une unique pièce et contenant pour tout mobilier un bureau et un lit. Sa femme s'installera avec lui mais les trois filles seront envoyés vivre dans une un bâtiment de la Fondation Francke, récemment réaffecté en internat par le pouvoir soviétique. Elke sera séparé de ses parents pendant les deux années qui suivront leur arrivée à Halle[5].
Elke mena à bien sa scolarité, passant l'Abitur (examens finaux) en 1957[1]. Elle passa ensuite une année comme ouvrière agricole en 1958/59 dans le cadre du projet d'amélioration des terres de la Jeunesse libre allemande ("Freie Deutsche Jugend" / FDJ) au sein d'un collectif agricole à Altmärkische Wische[1]. Cette forme d '«année sabbatique», requise avant de se lancer dans l'enseignement supérieur, n'était pas inhabituelle en République démocratique allemande à cette époque. En effet, la zone d'occupation soviétique d'après-guerre avait été en 1949 relancée et rebaptisée "République démocratique allemande". Désormais occupée par le Groupement des forces armées soviétiques en Allemagne, les soviétiques y imprimaient désormais leur idéologie.
Elke suit ensuite, entre 1959 et 1963, un cursus de quatre ans à l'Université de Halle afin de devenir professeur d'allemand et de russe. Elle étucie la germanologie, le slavisme, l’histoire et la pédagogie. Elle obtient ses diplômes mais réalise que pour son avenir, une carrière dans l'enseignement serait cauchemardesque[6].
Après la fin de ses études, Elke devient un temps bénévole puis directrice littéraire de Mitteldeutscher Verlag (de) entre 1963 et 1966[1],[7]. Ce travaille lui permet d'entrer en contact avec des membres à succès de l'establishment littéraire est-allemand[8]. Elle quittera son poste au bout de deux ans. Dans la seconde moitié de l'année 1965 et au début de 1966, elle est internée dans un hôpital psychiatrique[7],[6]. Elle s'installe ensuite à Berlin et entreprend une carrière d'écrivain indépendant. Initialement, elle vivait dans un appartement d'une pièce au dernier étage à Berlin-Hohenschönhausen[6]. Outre le fait de travailler sur ses propres textes, elle écrit aussi des critiques pour des éditeurs sur des drames russes et sur des œuvres de fiction[7]. Elle emménage ensuite dans un appartement partagé avec l'auteur-poète Adolf Endler dans le centre de Berlin. Ils se marieront en 1968[6], année où les premiers poèmes d'Elke seront publiés[7],[9]. Elke est à ce moment-là installée de façon permanente à Berlin[1].
En 1969, Elke entreprend un long voyage en Géorgie. Ses premières traductions majeures, parues en 1974, furent des textes de Marina Tsvetaeva[1],[10]. Elle produit d'autres œuvres, de poésie, de prose courte et de texte procéduraux, ainsi que d'autres traductions, notamment des romans d'Oleg Iouriev (ru) et des poèmes d'Olga Martynova (en). Ses traductions en allemand sont principalement faites à partir de textes russes, mais Elke traduit aussi des textes anglais, italiens et géorgiens[1],[11]. Elle travailla un moment comme rédactrice-compilatrice, notamment pour le Jahrbuch der Lyrik (de) annuel[12],[13] .
Dans un entretien avec l’écrivain Christa Wolf, publié à la fin de son volume « Le fil de la patience », l’auteur se caractérise en 1978 comme un « risque » et mène à son approche littéraire expérimentale :
« Je suis en dehors de la forme. Et c’est une chance et un risque. L’humanité prend un risque avec moi, je prends un risque. »[14]
Elke Erb devint, au fil des années, une sorte d'inspiratrice et de mentor pour le mouvement littéraire de Prenzlauer Berg[1]. Sa proximité avec le mouvement indépendant pour la paix, son implication en 1981 avec une anthologie "non officielle" de poésie lyrique et ses protestations (avec d'autres) en 1983 contre la privation de citoyenneté du jeune activiste des droits civiques Roland Jahn (en) se combinèrent pour en faire une victime de la surveillance de la Stasi[15],[16]. Il y eut une tentative, orchestrée par l'exécutif national, de l'exclure de l'Association des écrivains de l'Allemagne de l'est (de), sous la présidence d'Hermann Kant, et de restreindre ses privilèges de voyage, ce qui aurait sérieusement restreint sa capacité à gagner sa vie en écrivant. L'exclusion ne fut cependant jamais appliquée par la succursale locale de Berlin[17].
En 1988 parut son groupe lyrique « Kastanienallee », pour lequel elle a reçu le prix Peter Huchel 1988. Dans ce volume, elle élargit pour la première fois son écriture procédurale à une « forme de texte non hiérarchique, collectivement active"[18] qui inclut les auto-commentaires et indique ses propres conditions de production. Dans le volume « Kastanienallee », pour la première fois dans la littérature de la RDA, des influences évidentes de la poésie concrète et du Wiener Gruppe (groupe de Vienne) se font sentir, notamment par Ernst Jandl et Friederike Mayröcker. En outre, les textes d’Elke Erb de cette époque sont très proches de l’avant-garde littéraire récente de Prenzlauer Berg (Bert Papenfuß, Stefan Döring, Imprimerie Galrev).
Immédiatement après 1989, Elke Erb est devenue une critique de la situation républicaine fédérale, des nouveaux médias, de la liquidation des entreprises de la RDA et des spéculations fiduciaires:
« D’où viendra un sens de la culture dans un pays qui n’a pas de culture ? Et que pense la Deutsche Bank ? Juste bon, je pense (avec plaisir de la poignée métaphorique :) qu’ils ne peuvent pas effacer le Mecklembourg (z.B.) s’il s’avère que le Mecklembourg ne rejette rien. »[19]
Les livres d’Elke Erb sont publiés dans les petits éditeurs et magazines au-delà du courant dominant. Depuis 1998, elle a surtout publié chez Urs Engeler, spécialiste de la poésie, d’abord dans son édition Urs Engeler Editor, puis dans la série « roughbooks ». La revue la mer gelée a publié de nombreux poèmes de Elke Erb en traduction française (notamment par Françoise Lartillot, Alban Lefranc ou Aurélie Maurin), depuis 2005. Le numéro « Froid » (parution en mai 21, aux éditions Vanloo) propose une traduction et présentation d'une douzaine de poèmes.[20],[21]
En plus de son écriture, elle a travaillé sur de nouvelles formes de lecture et de présentation de la littérature et s’est engagée pour des auteurs plus jeunes. Monika Rinck, Ulf Stolterfoht, Steffen Popp ou Christian Filips, avec qui elle a vécu en colocation à Berlin-Wedding à partir de 2006, ont développé de nouveaux formats de performance (tels que le format « questions budgétaires » pour le festival Prosanova 2011 à Hildesheim)[22].
Le volume « Sonanz » publié en 2008 a fait l’objet d’une attention considérable. Des notates de 5 minutes », dans laquelle Elke Erb s’inscrit dans la tradition de l'écriture automatique, du surréalisme et la perpétue[23].
En mai 2012, Erb a été nommé membre de l’Académie des Arts de Berlin[24]. En 2017, un examen littéraire de son œuvre a été publié dans l’édition Text & Kritik. En 2018, elle a prononcé le « Discours de Berlin sur la poésie » intitulé « Le poème est ce qu’il fait »[25]. En 2019, le président fédéral Frank-Walter Steinmeier lui a décerné la Croix fédérale du Mérite au motif que:
« Avec sa ténacité légendaire, sa plaisanterie linguistique et ses créations de mots originales, elle est aujourd’hui encore une source d’inspiration pour les jeunes poètes. Elke Erb, avec sa vaste œuvre, est l’une des plus importantes poètes contemporaines de langue allemande qui, dans un esprit expérimental, n’a cessé d’élargir l’éventail des formes[26].
Le prix Georg Büchner a été décerné à Erb pour 2020. L’Académie allemande de la langue et de la poésie a justifié l’attribution du prix par le fait que l’auteur réussit comme personne d’autre à « réaliser la liberté et la wendité des pensées dans la langue en les défiant, en les assouplissant, en les précisant, voire en les corrigeant ». Pour l’héritier, « la poésie est une forme de connaissance politique et la plus vive ». Le prix lui a été décerné le 31 octobre 2020 à Darmstadt[27],[28].
Elke Erb est membre de l’Académie saxonne des Arts et vit aujourd’hui à Berlin et Wuischke dans la Oberlausitz.
Elke Erb fut mariée avec l'auteur poète Adolf Endler entre 1968 et 1978. Ils auront un fils, l’écrivain-musicien Konrad Endler, né en 1971[7].
Traductions françaises:
"Hiver, nouvelle terre. Poèmes", texte allemand, traduction française et présentation par Françoise Lartillot, in la mer gelée FROID/KALT 2021, p. 77-111.