Theodore Meir Bikel naît à Vienne dans une famille qui vient de l’ensemble des milieux du monde juif d’Europe centrale, ainsi que le raconte son nom: le patronyme Bikel est l’acronyme d’un verset liturgique, Bnei Israël kedoshim laYY (« les enfants d’Israël sont saints à YHWH »), choisi au hasard par son arrière-grand-père dans un livre de prières lorsque les Juifs de Bucovine furent sommés de se choisir un nom, et parce qu’il y avait dans la localité un autre individu d’ascendance sacerdotale; son nom hébraïque est hérité, selon la coutume de nomination ashkénaze, de son grand-père Maier Riegler, Juif assimilé dans l’empire austro-hongrois, geôlier de son état et décédé avant la naissance de son petit-fils; son prénom enfin lui a été donné par son père en hommage à Theodor Herzl, considéré comme le père du sionisme politique[3]. L’enfant grandit donc dans une famille sioniste-socialiste, idéologiquement opposée à l’observance du judaïsme mais viscéralement attachée à sa culture juive et c’est ainsi que Josef Bikel, qui ne fréquente pas les salles de prière, emmène régulièrement son fils écouter les vocalises des hazzanim dans les synagogues.
L’accession d’Adolf Hitler au pouvoir incommode de plus en plus la vie des Juifs en Autriche (même décoré des plus hauts insignes artistiques de ce pays, Bikel corrigera sa vie durant ceux qui le présentent comme Autrichien et préférera se dire «né en Autriche», arguant des mauvais traitements que lui ont fait subir les autorités[2]). Comme de nombreuses familles, les Bikel émigrent après le rattachement de l’Autriche au Troisième Reich en 1938 mais plutôt que de choisir un pays d’Europe ou les États-Unis, ils se décident pour la Palestine mandataire afin de mettre leur idéologie en pratique. Theodore Bikel étudie à l’école Mikvé-Israël et rejoint le kibboutz Kfar HaMaccabi, montrant plus de dispositions à chanter la vie des pionniers qu’à la partager.
Adolescent, il fait en 1943 ses premiers pas au théâtre Habima et fait partie des membres fondateurs du théâtre Cameri. Insatisfait des rôles qu’on lui propose, il se rend à Londres en 1946 pour étudier à la Royal Academy of Dramatic Art. En 1948, alors que l’état d’Israël déclare son indépendance, il choisit de demeurer au Royaume-uni, affirmant avoir privilégié sa carrière tandis qu’on l’accuse de couardise et de désertion car les acteurs sont appelés à divertir les soldats sur la ligne de front[4].
Une vie d’artiste
La même année, Michael Redgrave recommande Theodore Bikel à son ami Laurence Olivier, qui l’engage comme remplaçant pour la première d’Un tramway nommé Désir à West End. L’essai se révèle concluant, et Bikel se retrouve bientôt sous la lumière des projecteurs, interprétant Mitch face à Vivienne Leigh[5].
Après avoir tourné quelques films, Bikel décide de s’installer aux États-Unis en 1954. Il y entame, parallèlement à son métier d’acteur, une carrière de chanteur de musique traditionnelle[2], et produit plusieurs albums sous le label Elektra, s’accompagnant de divers artistes comme Geula Gill et Judy Collins. Cet homme qui parle couramment cinq langues et se débrouille dans deux autres, est capable de chanter les chants traditionnels de 21 pays mais il pense que le terme de «chanteur traditionnel» ne lui sied authentiquement que lorsqu’il chante dans le yiddish de son enfance. C’est ce talent de chanteur qui introduit Theodore Bikel à Broadway et il séduit le public en créant en 1959 le personnage de Georg von Trapp dans La Mélodie du bonheur; c’est tout spécialement pour lui et afin de mettre en valeur ses talents que la chanson Edelweiss est composée mais Bikel, qui dit fuir une sécurité qui finirait par le figer dans un stéréotype, quitte la pièce après deux ans alors que son succès ne s’est pas démenti. Il joue en 1964 le pompeux professeur hongrois Zoltan Karpathy qui se laisse abuser par Eliza Doolittle et, en 1967, Tevye le laitier dans Un violon sur le toit qu’il ne se privera cette fois pas de jouer plus de deux mille fois, et plus que tout autre acteur. Il enchaîne alors les participations spéciales dans diverses séries populaires, jouant de sa maîtrise des accents pour incarner des figures souvent pittoresques et généralement étrangères afin de varier son répertoire.
Ce désir de versatilité définit également sa vie, et Bikel multiplie les casquettes, conjuguant une carrière de chanteur traditionnel, d’activiste politique et de propriétaire de bars ainsi que d’autres établissements.
Our Song (with Alberto Mizrahi) (2007), Opus Magica Musica[22],[23]
Filmographie
Theodore Bikel excelle dans les petits et moyens rôles remarqués, jouant de sa maîtrise des accents et dialectes pour incarner des personnages le plus souvent étrangers: il est le pompeux phonétiste hongrois floué par Eliza Doolittle dans My Fair Lady, le capitaine du sous-marin russe échoué à Gloucester dans Les Russes arrivent, le sadique général français qui tient la fortesse d’Ávila dans Orgueil et Passion et jouera aussi plusieurs officiers allemands, un marchand arménien ou encore un malfrat bulgare. Son rôle de sheriff dans The Defiant Ones lui a valu une nomination aux Oscars en 1958[2].
1949: Ein Breira: Narrateur
1951: Appointment with Venus de Ralph Thomas: Homme au marchand de journaux
1951: L'Odyssée de l'African Queen (The African Queen) de John Huston: Premier officier
1952: Moulin Rouge de John Huston: Roi Milo IV de Serbie
1953: The Kidnappers: Willem Bloem
1953: A Day to Remember: Henri Dubot
1953: Desperate Moment: Anton Meyer
1953: Ne me quitte jamais (Never Let Me Go) de Delmer Daves: Flic de patrouilleur russe
1953: La Valse de Monte-Carlo (Melba) de Lewis Milestone: Paul Brotha
1954: La Loterie du bonheur (The Love Lottery): Parsimonious
1954: Voyage au-delà des vivants (Betrayed) de Gottfried Reinhardt: Sergent allemand
1954: Évasion (The Young Lovers): Joseph
1954: Le Cargo de la drogue (Forbidden Cargo): Max
1954: The Divided Heart: Josip
1955: Les Indomptables de Colditz (The Colditz Story) de Guy Hamilton: Vandy
1955: Opération Tirpitz (Above Us the Waves) de Ralph Thomas: un officier allemand
1956: Flight from Vienna: Kosice
1957: Les Vendanges (The Vintage) de Jeffrey Hayden: Eduardo Uribari
1957: Orgueil et Passion (The Pride and the Passion) de Stanley Kramer: le général Jouvet
1957: Torpilles sous l'Atlantique (The Enemy Below) de Dick Powell: 'Heinie' Schwaffer
1958: Man on the Run
1958: Tonnerre sur Berlin (Fräulein) de Henry Koster: Col. Dmitri Brikett
1958: La Chaîne (The Defiant Ones) de Stanley Kramer: Sheriff Max Muller
1958: J'enterre les vivants (I Bury the Living) d'Albert Band: Andy McKee
1958: Je veux vivre! (I Want to Live!) de Robert Wise: Carl G.G. Palmberg
1959: La Ferme des hommes brûlés (Woman Obsessed) d'Henry Hathaway: le docteur R. W. Gibbs
1959: Trahison à Athènes (The Angry Hills) de Robert Aldrich: Dimitrios Tassos
1959: L'Ange Bleu (The Blue Angel) d'Edward Dmytryk: Klepert
1960: A Dog of Flanders: Piet van Gelder
1964: My Fair Lady de George Cukor: Zoltan Karpathy
1965: Who Has Seen the Wind? (TV): Josef Radek
1965: Sands of the Kalahari de Cy Endfield: Dr. Bondrachai
1966: Les Russes arrivent (The Russians Are Coming the Russians Are Coming) de Norman Jewison: Le capitaine russe
1966: Noon Wine (TV)
1967: The Diary of Anne Frank (TV) d'Alex Segal
1968: Sweet November de Robert Ellis Miller: Alonzo
1968: Hawaï police d'État: saison 2: épisode La bête
1968: The Desperate Ones: Kisielev
1969: My Side of the Mountain de James B. Clark: Bando
1970: Darker Than Amber de Robert Clouse: Meyer
1971: 200 Motels de Tony Palmer et Frank Zappa: Rance Muhammitz / Dave
1972: Killer by Night (TV): Sgt. Phl 'Sharkey' Gold
1972: The Little Ark de James B. Clark: le capitaine
1975: Mystère sur le vol 502(en) (Murder on Flight 502) (TV): Otto Gruenwaldt
1976: Victoire à Entebbé (Victory at Entebbe) (TV) de Marvin J. Chomsky: Yakov Shlomo
1976: La Petite Maison dans la prairie (The House on the Prairie) (Série TV) saison 2, épisode 20 (Le centenaire (Centennial) ): Yuli Pyatakov
1977: Testimony of Two Men (feuilleton TV): Peter Heger
1977: Columbo: Les Surdoués (The Bye-Bye Sky High I.Q. Murder Case) (Série TV): Oliver Brandt
1978: Loose Change (feuilleton TV): Tom Feiffer
1978: The Stingiest Man in Town (TV): Marley's Ghost (voix)
1980: The Return of the King (TV) de Jules Bass et Arthur Rankin Jr.:: Aragorn (voix)
1964: Another World (série TV): Henry Davenport (1982-1983)
1997: Haute Trahison (Shadow Conspiracy) de George Pan Cosmatos: Prof. Yuri Pochenko
1998: Trickle: M.. Fix
1998: Babylon 5: In the Beginning (TV): Lenonn
1998: Le Ranch de l'amour (Second Chances): John Hathaway
2000: H.U.D. (TV): Ambassadeur Bjorn Jorgensen
2002: Crime and Punishment de Menahem Golan: Capitaine Koch
Interview
(de) Theodore Bikel, In der Mariahilferstraße hatten wir Nachbarn, die waren sehr nette und anständige Menschen in Christian Cargnelli, Michael Omasta (eds.): Aufbruch ins Ungewisse. Österreichische Filmschaffende in der Emigration vor 1945, Vienne, Wespennest, 1993.
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