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Le comte Robert de Montesquiou, né à Paris le [1] et mort à Menton (Alpes-Maritimes) le [2], est un homme de lettres français, poète, dandy et critique d'art et de littérature.

Robert de Montesquiou
Robert de Montesquiou.
Portrait par Giovanni Boldini (1897).
Paris, musée d'Orsay.
Titre de noblesse
Comte
Biographie
Naissance

Ancien 10e arrondissement de Paris
Décès
(à 66 ans)
Menton
Nom de naissance
Marie Joseph Anatole Robert de Montesquiou-Fezensac
Nationalité
Française
Domicile
Hôtel de Montesquiou-Fezensac (d)
Activités
Poète, critique littéraire, biographe, journaliste, écrivain, cavalier
Famille
Famille de Montesquiou
Autres informations
Propriétaire de
Palais Rose du Vésinet
Sport
Sport hippique

« Poète et dandy insolent »[3], il aurait servi de modèle à des Esseintes dans À Rebours (1884) de Huysmans et à Monsieur de Phocas de Jean Lorrain. Il fournit aussi à Marcel Proust l'un des modèles du baron de Charlus dans À la recherche du temps perdu, ce qui le rendit furieux malgré les dénégations de Proust[4]. La postérité l'a malmené sans tenir compte de la diversité de ses activités et de la qualité de ses écrits.


Biographie


Portrait du comte de Montesquiou par Whistler (1891).
Portrait du comte de Montesquiou par Whistler (1891).
Robert de Montesquiou et Gabriel Yturri par Sem.
Robert de Montesquiou et Gabriel Yturri par Sem.

Marie Joseph Robert Anatole de Montesquiou-Fézensac, quatrième et dernier enfant du comte Thierry de Montesquiou-Fézensac (1824-1904), vice-président du Jockey Club, et de la comtesse, née Pauline Duroux, petit-fils d'Anatole de Montesquiou-Fezensac, est issu par son père d’une très ancienne famille de la noblesse française, originaire de Gascogne, et par sa mère d'une famille bourgeoise cossue. Souffrant de ce qu'il ressentait comme une mésalliance de son père, il s'éloigne de sa mère, dont il déclare que la famille est suisse, ce qui est faux. Dans une lettre de 1896 à Marcel Proust, visible en 2022 au musée d'Art et d'Histoire du judaïsme (exposition sur Proust), il dit que sa mère est juive.

Sa sœur aînée, Élise, épousera Louis de Cambacérès (veuf de la princesse Bathilde Bonaparte).

En 1885, Montesquiou rencontre à Venise un jeune argentin Gabriel Yturri (1860-1905) qui devient son secrétaire et son compagnon[5].

L’abbé Mugnier évoque ainsi cette amitié : « Robert de Montesquiou (…) vient d’achever un livre à la mémoire de son ami Gabriel Yturri et m’invite à venir chez lui entendre la lecture d’un chapitre. C’est l’être qu’il a le plus aimé. » (Journal, , op.cit., p. 171) (…) « il m’a demandé de dire une messe tous les mois, le 12, pour son ami. Il me conduira à Versailles au beau monument funèbre qu’il lui a consacré » (idem., ).

Des jugements sévères ont été portés sur lui : « Poète de second ordre », « esthète au goût souvent discutable » pour certains[6], il ne serait pas parvenu « à composer le grand œuvre pour lequel il semblait tout désigné et auquel il songea » pour d'autres[7]. L'œuvre poétique et critique de Montesquiou, certes inégale, est pourtant d'une grande richesse et souvent d'une subtilité sensible. Si Forain l'appelait méchamment « Grotesquiou » et si Pierre Louÿs lui a consacré un poème très acide, Le comte R… de M…[8], il fut soutenu et défendu par Georges Rodenbach, Paul Verlaine, Anatole France, Leconte de Lisle, les frères Goncourt et bien d'autres, en particulier lors de la parution de ses principaux recueils, Les Chauves-souris (1892) et Les Hortensias bleus (1896). Il a aussi été entouré d'amis fidèles : d'abord sa cousine, la comtesse Greffulhe, le marquis et la marquise de Casa Fuerte, la princesse Bibesco, la comédienne Sarah Bernhardt[9], Madeleine Lemaire, qu'il surnomma l'« impératrice des roses »[10], la princesse de Léon, Judith Gautier, Gustave Moreau, James Abbott McNeill Whistler, Antonio de La Gandara, Georges Hoentschel, et même, pendant un temps, Octave Mirbeau. Gabriele D'Annunzio était un de ses amis notamment pendant la période que le grand poète italien passa à Arcachon. Les deux amis avaient une vision très semblable de la vie et une communauté d’intérêts. Il fréquentait le salon littéraire de Geneviève Bizet où il croisait Henri Meilhac, Paul Bourget, dandy comme lui et romancier, ou Joseph Reinach.

Il soutient l'avant-garde de son époque : Stéphane Mallarmé, Paul Verlaine en poésie ; Claude Debussy ou Gabriel Fauré en musique ; Paul Helleu et Léon Bakst en peinture. Montesquiou ne se contente pas alors d'aider intellectuellement certains créateurs : pour Verlaine, par exemple, il met en place une pension avec une dizaine de contributeurs (dont Maurice Barrès et la comtesse de Béarn) qui fut versée au poète à la fin de sa vie.

Il joue aussi un rôle essentiel dans la reconnaissance de certains auteurs : c'est le cas de la poétesse romantique Marceline Desbordes-Valmore à laquelle il consacre une conférence et dont il est l'un des initiateurs de la redécouverte, en organisant une cérémonie à Douai en 1896, avec inauguration d'une statue et lecture de textes par Sarah Bernahrdt et Marguerite Moreno.

Montesquiou rend aussi hommage à la fameuse comtesse de Castiglione, personnalité singulière du Second Empire, célèbre pour ses photographies et sa vie romanesque.

L'importance de Robert de Montesquiou pour Marcel Proust n'est plus à démontrer. Le comte permet au jeune écrivain de faire ses premières armes, d'entrer dans la haute société et aussi de porter un regard d'esthète sur la société. Se retrouve d'ailleurs dans le projet proustien une complexité de langue et d'écriture qui n'est pas étrangère au style de Montesquiou. Une abondante correspondance atteste de la proximité, tumultueuse toutefois, des deux hommes. Si Proust ne fut pas toujours aussi reconnaissant qu'il aurait pu l'être vis-à-vis de Montesquiou, les relations des deux écrivains restèrent cordiales, voire affectueuses, jusqu'à la mort du comte. Montesquiou souffre manifestement d'être réduit aux modèles de des Esseintes et de Charlus, alors que, dans la vie, il était très différent de ces deux personnages. Il ne cesse de se défendre de cette légende dans des textes particulièrement émouvants réunis en 1999 par Jean-David Jumeau-Lafond avec les textes de Proust consacrés à Montesquiou, un texte de Verlaine et des fragments de correspondance Proust-Montesquiou sous le titre d'un des articles que Proust lui dédia : Professeur de beauté [11].

Montesquiou portait sur le « Grand monde », qui était le sien, un regard souvent amusé, voire incisif comme l'attestent divers écrits, parfois posthumes ou inédits, tel Les Quarante Bergères, recueil de poèmes satiriques à clés consacré à des femmes de la haute société.

D'un caractère éruptif, Montesquiou ne pouvait s'empêcher de polémiquer à tout propos, ainsi lorsque la comtesse de Béarn, née Martine de Béhague, offre au Louvre un cadre ancien pour La Joconde[12].

Ses critiques littéraire et artistiques font preuve de justesse. On peut relire avec profit ses textes sur Émile Gallé (qui réalisa pour lui une commode et divers vases), le sculpteur Jean Carriès, Paul Helleu auquel Montesquiou consacre une importante monographie, René Lalique, Ingres, Delacroix, Gustave Moreau, Edward Burne-Jones, Arnold Böcklin et bien d'autres.

Portrait de Montesquioupar Félix Vallottonparu dans Le Livre des masquesde Remy de Gourmont (1898).
Portrait de Montesquiou
par Félix Vallotton
paru dans Le Livre des masques
de Remy de Gourmont (1898).

L’hôtel particulier du comte de Montesquiou, que ses parents firent édifier pour lui et son frère en 1858 par l'architecte Joseph-Michel Le Soufaché, existe toujours aujourd’hui au 1, boulevard de La Tour-Maubourg dans 7e arrondissement de Paris (il est actuellement occupé par le centre culturel de Chine).

Quant au château de la famille Montesquiou-Fézensac, situé à Artagnan, près de Vic-en-Bigorre dans les Hautes-Pyrénées, il a été détruit en 1934 par un incendie, dont les causes restent inexpliquées. Il est aujourd'hui en partie restauré.

À la suite de leur visite du , les frères Goncourt ont décrit la "garçonnière" de Montesquiou, du rez-de-chaussée avec jardin du 8, rue Benjamin-Franklin (où vécut de 1895 à sa mort en 1929 Georges Clemenceau et devenu en 1931 le musée Clemenceau) : « plein d'un méli-mélo d'objets disparates (...) une pièce où l'hortensia est représenté en toutes les matières et sous tous les modes de la peinture et du dessin (...) le jardin terminé par une sorte de serre-bibliothèque des livres préférés de Montesquiou, en même temps qu'un petit musée des portraits de leurs auteurs parmi lesquels nous figurons entre Baudelaire et Swinburne » [13].

Le , Montesquiou acquiert du milliardaire pârsî Ratanji Jamsetji Tata le Palais Rose du Vésinet, copie assez fidèle du Grand Trianon de Versailles, en plus petit. Séduit dès sa première visite, il se serait aussitôt écrié : « Si cette maison, qui n'est pas à vendre, et que d'ailleurs mes moyens modestes ne semblent guère me mettre en état d'acquérir, si cette maison improbable, impossible, et pourtant réelle, n'est pas à moi demain, je meurs[14] ! ». Il l'habite jusqu'en 1921 et la laisse à son dernier secrétaire Henri Pinard ; celui-ci la vendit à Luisa Amann, marquise Casati, muse de nombre d'artistes de la première moitié du XXe siècle qui, ruinée, l'abandonna à ses créanciers en 1932.

Montesquiou fut un collectionneur effréné mais plus sensible aux associations d'objets et de couleurs et aux reliques historiques qu'à l'importance des œuvres d'art ; il avait aussi la fâcheuse habitude de vendre ses portraits, comme celui de Whistler, ce qui le fâcha avec le peintre. Il fut surtout un bibliophile éminent. Le catalogue en plusieurs volumes de la vente de sa bibliothèque compte parmi les plus importants de son époque.

Tombe de Robert de Montesquiou.
Tombe de Robert de Montesquiou.

Montesquiou repose dans une tombe anonyme du cimetière des Gonards à Versailles, aux côtés de son compagnon Gabriel Yturri ; elle est surmontée de la statue de l'ange du silence, l'index de la main droite sur les lèvres et les orbites vides, statue provenant du château de Vitry-sur-Seine et achetée par Montesquiou.

Dans l'abondante œuvre poétique de Montesquiou, on peut citer quelques vers qui attestent de ses qualités d'inspiration et de son sentiment élégiaque ; ainsi lorsque le poète évoque la nuit et le sommeil comme une mort provisoire, le corps endormi et l'âme qui rêve :

« Mais, l'âme fait là-haut l'école buissonnière,

En des buissons ardents faits d'astres chevelus ;

L'effort renouvelé la rappelle en l'ornière ;

Le Corps veut bien revivre ; elle, ne le veut plus.

Tel, sous le drap qui semble un linceul de passage,

L'Humanité s'exerce à souffler son flambeau ;

Notre décès futur fait son apprentissage ;

Et l'homme, chaque nuit, se mesure au tombeau[15]. »


Scandale


Supposé présent lors de l'incendie du Bazar de la Charité, Robert de Montesquiou "survécut". Il fut accusé de s'être frayé un chemin vers la sortie en frappant violemment avec sa canne les femmes et les jeunes filles déjà encombrées par leurs toilettes. En réalité, Montesquiou n'était pas présent lors de cette tragédie. La rumeur concernant ce fait, propagée sans fondement par la famille d'Henri de Régnier, entraîna un duel retentissant entre Montesquiou et Régnier en , épisode qui mit fin à la diffamation, mais permit au comte de se distinguer encore par son dandysme malgré les circonstances[16] puisque le journaliste Louis Marsolleau, en rendant compte de l'événement, décrivit la canne arborée par le comte en cette circonstance comme "une ombre, un souffle, un rien, un fil de vierge, un fantôme de bâton, un spectre de badine ! Quelque chose de si léger, de si mince, de si atténué..ha! (...) d'un bois si tendrement anémié et si sveltement flexible qu'une tige de pavot en fût venue à bout au lieu d'en être décapitée[17]."


Postérité


Une partie de sa collection d'art est vendue par Drouot le [18].


Œuvres


Robert de Montesquiou. Gravure d'Henri Guérard d'après Whistler.
Robert de Montesquiou. Gravure d'Henri Guérard d'après Whistler.
Montesquiou (à gauche) chez Charvet (à droite). Au centre, Gabriel Yturri tend à Montesquiou  un caleçon orné de chauves-souris (caricature de Sem).
Montesquiou (à gauche) chez Charvet (à droite). Au centre, Gabriel Yturri tend à Montesquiou un caleçon orné de chauves-souris (caricature de Sem).

Montesquiou a publié dix-huit volumes de poésie, vingt-deux œuvres critiques, deux romans et deux biographies. Ses trois volumes de souvenirs ont été imprimés après son décès.


Poésie



Essais



Romans



Biographies



Théâtre



Mémoires



Correspondances



Iconographie (liste partielle)


Portrait du comte Robert de Montesquiou (1879), par Henri-Lucien Doucet (château de Versailles).
Portrait du comte Robert de Montesquiou (1879), par Henri-Lucien Doucet (château de Versailles).

Notes et références


  1. Archives en ligne de Paris, état civil reconstitué (XVIe-1859), vue 69/101
  2. Archives départementales des Alpes-Maritimes, commune de Menton, année 1921, acte de décès no 282, vue 82/98
  3. Cyril Grunspan "Marcel Proust: tout dire", 2005, page 35.
  4. William Howard Adams "En souvenir de Proust: les personnages du temps perdu" Edita, 1985, page 76.
  5. Francesco Rapazzini "Elisabeth de Gramont: Avant-gardiste", Fayard, 2004, page 57.
  6. Antoine Bertrand, Les Curiosités esthétiques de Robert de Montesquiou, Librairie Droz, 1996, page 10
  7. Antoine Bertrand Les Curiosités esthétiques de Robert de Montesquiou, Librairie Droz, 1996, page 44.
  8. p. 340 de l'édition de ses Poésies, Paris, Jean-Jacques Pauvert, 1988.
  9. Il lui avait dédié un poème inédit: «À Sarah Bernhardt (pour sa fête en 97)», faisant partie de la vente publique de la bibliothèque de la comédienne: Bibliothèque de Mme Sarah Bernhardt. Paris, Librairie Henri Leclerc. 1923 [25-27 juin]. 2 volumes [no 229: Robert de Montesquiou, «À Sarah Bernhardt (pour sa fête en 1897)» - poème manuscrit inédit]. Ce manuscrit inédit a été à nouveau vendu le chez Christie's à Paris.
  10. André Germain, Les Clés de Proust, Paris, éd. Sun, 1953, p. 52
  11. Proust Montesquiou (préf. Jean-David Jumeau-Lafond), Professeur de beauté, Paris, La Bibliothèque, (ISBN 978-2-909688-16-9)
  12. Jean-David Jumeau-Lafond, Martine de Béhague. Une esthète à la Belle époque., Paris, Flammarion, .
  13. Journal, cité par Arnaud Teyssier, Le Tigre dans sa tanière Georges Clemenceau, rue Franklin, dans Une journée avec, collectif sous la direction de Frantz-Olivier Giesbert et Claude Quétel, Perrin/Le Point, 2016, note 6 p. 193)
  14. Site de la Société d'Histoire du Vésinet : Le Palais Rose
  15. Robert de Montesquiou, Les Hortensias bleus : pages choisies, Paris, éditions des autres, , 416 p. (ISBN 2-7305-0048-0), p. 286-287
  16. Jean-David Jumeau-Lafond, Portraits "fin de siècle" : du dandy à l'esthète dans Figures du dandy, de Van Dyck à Oscar Wilde, Paris, Petit Palais, musée des Beaux-Arts de la Ville de Paris, , 85 p. (ISBN 978-2-9543279-4-5), p. 79
  17. Louis Marsolleau, « En passant », Le Rappel, , p. 1
  18. Olivier Coutau-Bégarie, Cyrille Boulay et Axel Louot, Souvenirs historiques, militaria, Paris, 67 p.

Annexes



Bibliographie


Par ordre chronologique :


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[en] Robert de Montesquiou

Marie Joseph Robert Anatole, Comte de Montesquiou-Fézensac (7 March 1855, Paris – 11 December 1921, Menton), was a French aesthete, Symbolist poet, painter, art collector, art interpreter, and dandy. He is reputed to have been the inspiration both for Jean des Esseintes in Joris-Karl Huysmans' À rebours (1884) and, most famously, for the Baron de Charlus in Marcel Proust's À la recherche du temps perdu (1913–1927).[1] Some believe that he may even have been used by Oscar Wilde in The Picture of Dorian Gray.[2]

[es] Robert de Montesquiou

Robert de Montesquiou (Marie Joseph Robert Anatole), conde de Montesquiou-Fézensac (París, Francia, 7 de marzo de 1855 - Menton, Francia, 11 de diciembre de 1921) fue un aristócrata poeta perteneciente al movimiento simbolista francés, así como mecenas del arte y afamado dandi.
- [fr] Robert de Montesquiou

[ru] Монтескью, Робер де

Граф Робер де Монтескью или Монтескьё-Фезансак (фр. Marie Joseph Robert Anatole de Montesquiou-Fézensac, 7 марта 1855, Париж — 11 декабря 1921, Ментона) — французский писатель, денди, коллекционер, библиофил и покровитель искусств, характерная фигура конца века. Двоюродный брат графини Греффюль.



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