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Jane de La Vaudère est le nom de plume de Jeanne Scrive, femme de lettres française (Paris, - Paris 17e, [1]). Son œuvre, à l'intersection du naturalisme et du mouvement décadent, est représentative de l'esprit et du style fin de siècle. Disposant d'un assez large public avant la Grande Guerre, traduite dans plusieurs langues (allemand, portugais[2], espagnol, tchèque, hongrois), elle tomba par la suite dans un oubli presque total, jusqu'à ce que son abondante production connaisse un regain d'intérêt, grâce au renouvellement des études sur la littérature de la fin du dix-neuvième siècle[3].

Jane de la Vaudère
Jane de La Vaudère à sa table de travail vers 1905.
Biographie
Naissance

Paris
Décès
(à 51 ans)
17e arrondissement de Paris
Nationalité
Française
Activités
Poétesse, écrivaine, auteure dramatique
Prononciation
Signature

Sa vie


Jane de La Vaudère naquit à Paris, le . Flamande par son père, alsacienne par sa mère, elle était issue de la bonne société. Son père, Gaspard-Léonard Scrive, chirurgien militaire célèbre, avait été le médecin en chef de l'armée française durant la Guerre de Crimée. Son oncle maternel, Louis Loew (1828-1917), fut président de la chambre criminelle de la Cour de cassation de 1886 à 1899, et, à ce titre, fut mêlé de près à la révision de la condamnation de Dreyfus. Très tôt orpheline de père et de mère[4], elle fut placée au couvent de Notre-Dame de Sion, dont la supérieure, mère Marie-Emélie Lagarmitte, était une de ses cousines. À l'âge de 18 ans, le 29 avril 1875, elle épouse Camille Gaston Crapez (1848-1912), rencontré au Mans à l'occasion d'une visite chez sa sœur aînée Marie, mariée au médecin militaire Dauvais de Gerardcourt. Gaston Crapez héritera de sa mère le château de la Vaudère à Parigné-l'Évêque dans la Sarthe, propriété à laquelle elle empruntera son pseudonyme littéraire. Leur fils, Fernand Crapez, fut lui-même maire de cette petite ville. C'est toutefois à Paris qu'elle vécut, d'abord au 39, rue La Boétie, puis au 9, place des Ternes, où elle recevait le mercredi, dans un appartement savamment décoré à l'atmosphère fin de siècle. Dans Mon Paris et ses Parisiens, André de Fouquières rapproche Jane de La Vaudère de la baronne Deslandes, évoquant « des actrices sans théâtre, mais non sans rôle. »

Carte postale publicitaire des éditions Flammarion
Carte postale publicitaire des éditions Flammarion

Elle fut faite officier de l'Instruction publique (distinction honorifique que l'on connaît aujourd'hui sous le nom de Palmes académiques). Elle mourut le . Ses obsèques eurent lieu le en l'église Saint-Ferdinand-des-Ternes (Paris). Le quotidien Le Temps du faisait part de sa disparition en ces termes : « On annonce la mort d'un écrivain connu, Mme Jane de La Vaudère, auteur de plusieurs ouvrages où la hardiesse du sujet n'enlevait rien à la grâce littéraire. »

Jane de La Vaudère repose au cimetière du Montparnasse (8e division).


Son œuvre


Tombe de Jean-Jacques Weigel (1784-1856), grand-père maternel de Jane de La Vaudère, au cimetière Sainte-Hélène de Strasbourg. Le médaillon est dû à André Friederich
Tombe de Jean-Jacques Weigel (1784-1856), grand-père maternel de Jane de La Vaudère, au cimetière Sainte-Hélène de Strasbourg. Le médaillon est dû à André Friederich

Elle est l'auteur d'une quarantaine d'œuvres. On compte plus de trente romans et recueils de nouvelles, quatre recueils de poésie et une dizaine de pièces, opérettes, comédies ou drames. Malgré le succès dont attestent ses tirages ainsi que le nom de ses éditeurs (Méricant, Ollendorff et Flammarion), malgré sa collaboration à de nombreux périodiques de l'époque, elle ne parvint pas à devenir membre du comité d'administration de la Société des gens de lettres[5]. Il est vrai que la Belle Époque fut riche en romancières de talent, et les "mâles" des lettres ne voyaient pas d'un bon œil cette concurrence. Elle fut proche cependant d'Émile Zola dont elle adapta un conte pour le théâtre du Grand-Guignol[6].

La couverture des Androgynes, illustrée par Maurice Neumont.
La couverture des Androgynes, illustrée par Maurice Neumont.

Sa poésie fut saluée par Leconte de Lisle, qui dit d'elle « qu'elle avait le charme et la vigueur, une palette abondante, composée des nuances les plus tendres et des tons les plus chauds »[7].

Couverture de La Vierge d'Israël, illustrée par Charles Atamian.
Couverture de La Vierge d'Israël, illustrée par Charles Atamian.

La plupart de ses romans traitent avec habileté les thèmes naturalistes ou décadents ; ils font de Jane de La Vaudère un écrivain représentatif de l'esprit et du style fin-de-siècle. On peut citer, parmi ses œuvres les plus représentatives, L'Anarchiste, Le Droit d'aimer, Les Sataniques, ou encore Les Androgynes et Les Demi-Sexes, qui concentrent les représentations polymorphes du saphisme et de l'uranisme propres à la Belle Époque. Elle cultiva aussi le roman historique et l'exotisme ( Les Courtisanes de Brahma, Les Mystères de Kama, La Vierge d'Israël, La cité des sourires). Quant à son roman La Porte de félicité, il témoigne de son net engagement en faveur des Arméniens opprimés par l'Empire ottoman.

Le château de la Vaudère avant la Grande Guerre.
Le château de la Vaudère avant la Grande Guerre.

On lui doit aussi l'adaptation pour le théâtre d'un conte de Zola, Pour une nuit d'amour, sous le nom de Jean Scrive, en collaboration, une comédie en vers, Les Statues, et une fantaisie japonaise, Les Trois Mousmés. Elle écrivit également en collaboration avec Félicien Champsaur un conte japonais, et avec Aurélien Scholl, une comédie en quatre actes, L'Éclosion.


Poèmes


Les œuvres de Jane de La Vaudère étant introuvables ou presque, voici quelques-uns de ses vers.

La Couleur des baisers
Les mots ont leur couleur et les baisers aussi :
Les uns, du ton pâli des roses effeuillées,
S'envolent tristement vers les cimes brouillées
Où pleure le regret du souvenir transi.
D'autres, dernières fleurs, sur le chemin durci,
Aux pétales de givre, aux corolles fouillées
Dans des pleurs de cristal, sont aux âmes rouillées
D'un blanc immaculé, sous le ciel obscurci.
Quelques-uns ont le ton discret des violettes ;
D'autres, presque effacés, doux et frêles squelettes,
Me semblent un essaim de grands papillons gris.
Le baiser noir du mal mord ainsi qu'une gouge,
Mais le roi des baisers dont mon être est épris
Est ton baiser de sang, ton ardent baiser rouge !

(Évocation)

Fleurs d'eau
L'hybride nymphéa, calice d'or vivant,
Qui lève dans les joncs son éclatant visage,
Et paraît contempler le sombre paysage
Qui fait à sa splendeur un asile fervent.
Le nymphéa neigeux des rives taciturnes,
Dont le sein orgueilleux est un jardin d'amour
Où des souffles divins errent pendant le jour
Pour parfumer, là-haut, les nymphéas nocturnes.
Le mystique lotus qui semble un trou d'azur
Ouvert sur le vieux Gange en un ciel de mystère,
Un ciel transparaissant au travers de la terre,
Mais un ciel plus profond, plus ardent et plus pur.
Le grand nelumbium aux anthères vernies
Qui semblent rayonner en astrales clartés ;
Les iris plucheux des étangs attristés
Qui montrent leurs fronts bleus aux douceurs infinies.
Depuis la populage à la lentille d'eau,
Depuis la sagittaire à la valisnerie,
Mon rêve se repose en cette île fleurie
Dont le lac ténébreux porte le vert fardeau.
Hôte des fonds cachés, cher monde énigmatique,
Fleurs aux stigmates noirs comme des yeux pervers !
Vous créez, dans la nuit, les pâles univers
Où flotte vaguement votre âme romantique.
Tendant, au ras du sol, l'éventail de velours
De votre épais feuillage où l'humble animalcule,
S'éveille, vit et meurt, de l'aube au crépuscule,
Vous soutenez l'orgueil de vos pétales lourds.
Semblant dans un miroir réfléchir les planètes,
Vous étalez, sur l'eau, vos faces de clartés,
Et vos âmes de fleurs sont des affinités
Adorables avec les âmes des poètes !
Dans votre mare glauque où se brouille le ciel,
Sous la douve et la flambe aux haleines fiévreuses,
J'entends se réveiller mille voix amoureuses
Qui chantent leur bonheur dans le couchant de miel.
C'est une mélodie enivrante et divine :
Faites d'ardents sanglots et de tristes chansons ;
Et l'on croit voir monter d'ineffables frissons
Des noires profondeurs que le désir devine.
Dans votre air maladif mon esprit est moins seul,
Évoquant, en secret, d'étranges atavismes ;
Et, cédant éperdue, à vos doux magnétismes,
Je voudrais m'endormir sous votre vert linceul !

(Évocation)


Liste des œuvres


À une exception près, aucune des œuvres de Jane de La Vaudère n'a été rééditée ; on a donc indiqué entre parenthèses, pour chaque titre, la cote de l'ouvrage tel qu'on peut le consulter à la Bibliothèque nationale de France.

Poésies
Romans et nouvelles
Théâtre
Divers

Références


  1. Acte de décès à Paris 17e, n° 1870, vue 4/31.
  2. Ses livres furent d'ailleurs, de 1926 à 1975, interdits au Portugal.
  3. Renouvellement largement dû, en France, aux stimulants travaux menés en Sorbonne, de 1979 à 1999, dans le séminaire du professeur Jean de Palacio.
  4. Sa mère, Barbe Elisabeth Scrive, était la fille du notaire et conseiller municipal de Strasbourg Jean-Jacques Weigel : elle mourut en 1870. Jane de La Vaudère avait une sœur, Marie Scrive (1849-1918), qui épousa un médecin militaire, J.-B. Dauvais de Gérarcourt (1820-1888).
  5. Elle en était sociétaire
  6. Émile Zola, Pour une nuit d'amour ! : drame en 1 acte, P. Ollendorff, (lire en ligne)
  7. Angelo Mariani, Figures contemporaines tirées de l'Album Mariani, Flammarion,
  8. Jane de The Centre for 19th Century French Studies - University of Toronto, Le mystère de Kama: roman [magique], Paris: E. Flammarion, (lire en ligne)
  9. Jane de The Centre for 19th Century French Studies - University of Toronto, L'amazone du roi de Siam : roman, Paris: E. Flammarion, (lire en ligne)
  10. Jane de The Centre for 19th Century French Studies - University of Toronto, Maurice Neumont, Tristan Bernard et Valentin Mandelstamm, Folie d'opium : roman, Paris : Roman-Bibliotheque, Albert Méricant, (lire en ligne)
  11. Jane de (1857-1908) Auteur du texte La Vaudère, Les courtisanes de Brahma : roman / Jane de La Vaudère, (lire en ligne)
  12. Jane de The Centre for 19th Century French Studies - University of Toronto et Ch Atamian, Le harem de Syta : roman passionnel, Paris: A. Méricant, (lire en ligne)
  13. Jane de The Centre for 19th Century French Studies - University of Toronto et Ch Atamian, La porte de félicité: roman, Paris: E. Flammarion, (lire en ligne)
  14. Jane de (1857-1908) Auteur du texte La Vaudère, Le Modèle, comédie en 1 acte, en vers / J. de La Vaudère, (lire en ligne)
  15. « Les Cahiers naturalistes : bulletin officiel de la Société littéraire des amis d'Emile Zola », sur Gallica, (consulté le )
  16. Archives nationales, « Censure des répertoires des "petits" théâtres parisiens : index des pièces (1802-1906) : notice descriptive du manuscrit de la pièce Cambrioleurs, conservé aux Archives nationales », sur Portail documentaire des Archives nationales (consulté le )
  17. Archives nationales, « Censure des répertoires des "petits" théâtres parisiens : index des pièces (1802-1906) : notice descriptive du manuscrit de la pièce Guignolette à l'Exposition, conservé aux Archives nationales », sur Portail documentaire des Archives nationales (consulté le )
  18. Archives nationales, « Censure des répertoires des "petits" théâtres parisiens : index des pièces (1802-1906) : notice descriptive du manuscrit de la pièce Kadidja, conservé aux Archives nationales », sur Portail documentaire des Archives nationales (consulté le )
  19. Archives nationales, « Censure des répertoires des "petits" théâtres parisiens : index des pièces (1802-1906) : notice descriptive du manuscrit de la pièce Les Débuts de Caroline, conservé aux Archives nationales », sur Portail documentaire des Archives nationales (consulté le )

Bibliographie


Études consacrées à Jane de la Vaudère

On se reportera également aux introductions que Brian Stableford a données à ses traductions en anglais :

Anthologies et dictionnaires
À propos de la décadence et de la Belle Époque
Témoignages des contemporains

Articles connexes



Liens externes



На других языках


[en] Jane de La Vaudère

Jane de la Vaudère (15 April 1857 – 26 July 1908) was the pen name of Jeanne Scrive, a French novelist, poet and playwright.
- [fr] Jane de La Vaudère



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