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Tristan Corbière, nom de plume d'Édouard-Joachim Corbière, né le à Ploujean (aujourd'hui Morlaix, dans le Finistère) et mort le à Morlaix, est un poète français.

Tristan Corbière
Photographie de Tristan Corbière par Thomas Blanchet parue dans l'édition définitive des Amours jaunes de 1926.
Biographie
Naissance

Ploujean, Bretagne,
(aujourd'hui Morlaix)
Décès
(à 29 ans)
Morlaix, Bretagne
Sépulture
Nom de naissance
Édouard-Joachim Corbière
Surnom
Tristan Corbière
Nationalité
Française
Formation
Lycée Georges-Clemenceau
Activité
Poète
Père
Édouard Corbière
Parentèle
Jules Chenantais (cousin germain)
Autres informations
Mouvement
Décadentisme, Symbolisme
Adjectifs dérivés
Corbiérien, corbiérienne[1]
Œuvres principales
Les Amours jaunes, 1873

Proche du symbolisme, il est l'auteur d'un unique recueil poétique, Les Amours jaunes, et de quelques fragments en prose. Tristan Corbière mène une vie marginale et miséreuse, nourrie de deux grands échecs dus à sa maladie osseuse et à sa « laideur » presque imaginaire qu'il se complaît à accuser : celui de sa vie sentimentale  il aima sans retour une seule femme, Armida-Josefina Cuchiani[2], prénommée « Marcelle » dans son œuvre , et celui de sa passion pour la mer  il rêvait de devenir marin, comme son père Édouard Corbière. Sa poésie porte en elle ces deux grandes blessures qui l'amèneront à adopter un style très cynique et incisif, envers lui-même autant qu'envers la vie et le monde qui l'entourent.

Ses vers teintés de symbolisme et aux idées proches du décadentisme rejettent et condamnent tous les courants littéraires de son époque, du romantisme[2] au Parnasse, car leur créateur excentrique se veut « indéfinissable, incatalogable, pas être aimé, pas être haï ; bref, déclassé de toutes les latitudes »[3]. Son écriture poétique est caractérisée par l'abondance de ponctuation, le manque de polissage, et une anti-musicalité, le tout présentant un aspect heurté et brut, qui fut d'abord perçu comme une impuissance à mieux faire[4], avant d'être reconnu plus tard comme une destructuration volontaire du vers (« cassant, concis, cinglant le vers à la cravache »[3]).

À la publication en 1873 à compte d'auteur de son unique œuvre, Les Amours jaunes, il passe totalement inaperçu dans les milieux littéraires de l'époque, et il faudra attendre dix ans pour que Paul Verlaine le révèle au grand public dans son essai Les Poètes maudits[5].

Corbière fut aussi un illustrateur et un caricaturiste de talent, comme en témoigne l'album ffocsoR, retrouvé en 2010 par Benoît Houzé à Glasgow[6], ainsi que les 24 caricatures relatives à la Commune de Paris, retrouvées en 2021 dans la bibliothèque de Bologne par Francesca Rossi[7].

Il meurt peut-être tuberculeux, célibataire sans enfant et sans travail, retranché dans son vieux manoir breton, incompris de ses contemporains (« Ah, si j'étais un peu compris ! »[8]), et sa poésie novatrice ne sera reconnue que bien après sa mort.


Biographie



Enfance et études


Tristan Corbière en uniforme de lycéen vers 1861-1862. Photographie anonyme.
Tristan Corbière en uniforme de lycéen vers 1861-1862. Photographie anonyme.

Édouard-Joachim Corbière nait le au manoir de Coat-Congar, à Ploujean, près de Morlaix, de l'union de Jean-Antoine-René-Édouard Corbière dit Édouard Corbière (1793-1875) et d'Angélique-Aspasie Puyo. Son père, alors déjà un célèbre marin, journaliste, et romancier maritime. Il avait épousé la mère du poète l'année précédente, fille de l'un de ses amis, alors qu'elle était âgée de 18 ans. Trente-trois ans séparent ses deux parents.

Photographie anonyme de Tristan Corbière, vers 1870.
Photographie anonyme de Tristan Corbière, vers 1870.
Médaillon en hommage à Tristan Corbière sur une habitation à Roscoff.
Médaillon en hommage à Tristan Corbière sur une habitation à Roscoff.

Tristan Corbière passe une enfance paisible dans la propriété, louée par ses parents, dite « Le Launay », à une centaine de mètres de Coat-Congar, à Morlaix. Sa sœur, Lucie, nait en 1850, puis son frère, Edmond, en 1855. Il est envoyé à Pâques 1859 en pension au lycée impérial de Saint-Brieuc, en classe de quatrième, après avoir suivi l'année précédente les cours du maître morlaisien M. Bourgeois. C'est un moment difficile pour lui, jusque-là élevé tranquillement près de ses parents. Mis à part en français et en latin, c'est un élève médiocre, qui a des relations difficiles avec ses professeurs comme avec ses camarades. La majeure partie de sa correspondance (50 lettres sur 60) date de cette époque, où il écrit en moyenne tous les trois jours à sa famille, et dans laquelle il raconte son quotidien d'élève, mais fait également part de ses sentiments, de l'amour qu'il porte à sa famille, et du manque de celle-ci[9]. C'est le jeudi, son jour de sortie, qu'il retrouve un peu du bonheur familial chez des amis de ses parents, les Bazin. C'est à cette époque qu'il commence à souffrir de rhumatismes articulaires, et d'engelures aux mains. Malgré ses mauvais résultats, il obtient à la distribution des prix du un 2e accessit de thème latin, sa matière de prédilection. L'année suivante, au pensionnat, naît sa vocation de poète et de caricaturiste : son premier poème connu « Ode au chapeau », datant de , est une satire sur le chapeau de son professeur d'histoire. Au palmarès du , il obtient trois prix : le 2e prix de version latine, le 1er accessit de thème latin, et le 1er accessit de vers latins.

Son état de santé s'aggravant, il doit quitter Saint-Brieuc en août pour rejoindre son oncle médecin, Jules Chenantais établi à Nantes. Il entre le en seconde-lettres au lycée qui deviendra le lycée Georges-Clemenceau en qualité d'externe, étant logé chez son oncle. Le , il remporte le 1er accessit de narration et de thème latin. En 1862, à la suite d'une grave crise, il reste partiellement infirme, et voyage en Provence avec sa mère pendant les vacances d'été pour des raisons de santé. Malgré sa préférence de son nouveau lycée, l'aggravation de sa maladie l'empêche de passer le baccalauréat au terme de sa classe de rhétorique et logique.


D'une vie d'invalide fantaisiste à la mort


Sa vie de marginal commence lorsqu'il s'installe à Roscoff, en Bretagne, dans une maison que possèdent ses parents, où il lit les œuvres de son père, de Victor Hugo, de Charles Baudelaire et d'Alfred de Musset. Les habitants du village le surnomment l'« Ankou », c'est-à-dire le spectre de la mort, en raison de sa maigreur et de son allure disloquée. Il aime prendre la mer sur son bateau, Le Négrier (titre du plus célèbre roman de son père), et se livre à quelques excentricités. Il s'amuse un jour à se déguiser en forçat, en femme ou en mendiant, l'autre à se raser les sourcils ou bien encore, alors qu'il est en visite à Rome, à traîner un porc en laisse déguisé en évêque lors du carnaval auquel assiste le pape. C'est ainsi que s'écoulent ses jours, jusqu'à sa rencontre avec une petite actrice parisienne que Tristan Corbière se plaît à appeler Marcelle, de son vrai nom Armida Josefina Cuchiani ; elle devient sa muse.

Délaissant son prénom d'état-civil, Édouard-Joachim, pour prendre celui, plus évocateur, de Tristan  pour « Triste en corps bière » , il fait paraître à compte d'auteur en 1873 son unique recueil de poèmes, Les Amours jaunes, qui passe inaperçu. Lui qui ne connut aucun succès de son vivant, il sera révélé de manière posthume par Paul Verlaine, qui lui consacre un chapitre de son essai Les Poètes maudits (1884). Le recueil se trouve également en bonne place dans la bibliothèque élitiste de Des Esseintes, le héros d'À rebours : cette présence dans l'œuvre de Joris-Karl Huysmans contribuera à faire connaître le poète au public.

Le poète qui rêvait d'être marin ne put satisfaire son désir de courir les mers, malgré son amour passionné pour celle-ci.

Il meurt à Morlaix le et enterré au cimetière Saint-Augustin[10]. Il n'a pas 30 ans et n'a connu qu'une vie de solitude, brève et misérable, constamment atteint dans sa chair par la maladie, malheureux en amour, englué dans une passion unique et sordide ; sans doute, au figuré, la mer fut-elle sa véritable épouse. Le temps a rendu le poète à la lumière, et reconnu, bien tard, son talent.

Le nom des Amours jaunes, son unique recueil, a été donné à la bibliothèque publique ancienne de Morlaix.

Son poème « Litanie du sommeil » est inclus par André Breton dans l'Anthologie de l'humour noir.


Sa poésie


Portrait de Tristan Corbière par Manuel Luque paru dans la seconde édition des Poètes maudits de Verlaine (1888), puis dans la revue La Plume en 1891.
Portrait de Tristan Corbière par Manuel Luque paru dans la seconde édition des Poètes maudits de Verlaine (1888), puis dans la revue La Plume en 1891.

Les sources de la poésie de Corbière sont multiples : le poète a été marqué par le romantisme. Son œuvre puise également, de différentes manières, dans le XVIIe siècle, dans la poésie du XVIe siècle et, suivant la mode romantique pour le Moyen Âge, fait souvent référence à la figure de François Villon[11].

Corbière a également puisé l'inspiration de certains textes dans les légendes bretonnes  un des chapitres des Amours jaunes est titré « Armor »  ce qui lui a parfois valu de passer pour un écrivain régionaliste. Il s'est inspiré des gens qu'il côtoyait, peignant par exemple la foule se pressant aux pardons de Sainte-Anne-la-Palud. Un de ses textes évoque les conscrits bretons oubliés dans des conditions de grand dénuement dans le camp militaire de Conlie (Sarthe) en 1870.


Réception critique


« Bohème de l’Océan — picaresque et falot — cassant, concis, cinglant le vers à la cravache — strident comme le cri des mouettes et comme elles jamais las — sans esthétisme — pas de la poésie et pas du vers, à peine de la littérature — sensuel, il ne montre jamais la chair — voyou et byronien — toujours le mot net — il n’est un autre artiste en vers plus dégagé que lui du langage poétique — il a un métier sans intérêt plastique — l’intérêt, l’effet est dans le cinglé, la pointe-sèche, le calembour, la fringance, le haché romantique — il veut être indéfinissable, incatalogable, pas être aimé, pas être haï ; bref, déclassé de toutes les latitudes, de toutes les mœurs, en deçà et au-delà des Pyrénées. »Jules Laforgue[12].


Œuvres


Autres éditions

Éditions partielles



Autres œuvres



Hommages



Postérité



Adaptations musicales


Félix Vallotton, Portrait de Tristan Corbière, paru dans Le Livre des masques de Remy de Gourmont (1896).
Félix Vallotton, Portrait de Tristan Corbière, paru dans Le Livre des masques de Remy de Gourmont (1896).

Utilisations dans des œuvres audiovisuelles



Romans dont Tristan Corbière est le héros



Notes et références


  1. « Adjectif dérivé de Corbière », sur le site corbiere.ville.morlaix.fr, consulté le .
  2. Charles Cros, Tristan Corbière, Œuvres complètes, éd. Pierre-Olivier Walzer et Francis F. Burch pour Tristan Corbière, Gallimard, coll. Bibliothèque de la Pléiade, 1970, page 1261
  3. Jules Laforgue, une étude sur Corbière, notes posthumes, France Diplomatie
  4. Charles Cros, Tristan Corbière, Œuvres complètes, éd. Pierre-Olivier Walzer et Francis F. Burch pour Corbière, Gallimard, coll. Bibliothèque de la Pléiade, 1970, p. 681, introduction (« Ce qui frappe d'abord chez Corbière, c'est une absence d'apprêt […] Les lecteurs y ont vu longtemps une impuissance à faire mieux »)
  5. Essai de Paul Verlaine, Les Poètes maudits, 1884 : Tristan Corbière, Arthur Rimbaud, Stéphane Mallarmé.
  6. ouest-france.fr.
  7. Cet ensemble a été publié dans le no 4 des Cahiers Tristan Corbière, précédé d'une introduction de Benoît Houzé, intitulée Tristan et ses gens du peuple (cf. letelegramme.fr). Album en ligne sur dl.ficlit.unibo.it.
  8. « Sous un portrait de Corbière », vers 17, in : Charles Cros, Tristan Corbière, Œuvres complètes, éd. Pierre-Olivier Walzer et Francis F. Burch pour Corbière, Gallimard, coll. « Bibliothèque de la Pléiade », p. 881, 1970.
  9. Voir la fin de la lettre de Tristan Corbière à Mme Édouard Corbière du (Saint-Brieuc, mardi matin) : « Je répète toujours la même chanson pour me consoler d'être séparé de vous : dans trois mois je verrai papa, maman, ma bonne et tous mes parents, et dans 15 jours j'irai chez M. Bazin. »
  10. « Cimetière Saint-Augustin de Morlaix : Tombe de Tristan Corbière », sur le site landrucimetieres.fr, consulté le .
  11. Olivier Parenteau, « Tristan Corbière lecteur de François Villon », Études littéraires, (lire en ligne).
  12. France Diplomatie.
  13. Manuscrit inédit de Tristan Corbière, sur le site francoiselivinec.com, consulté le .
  14. tard-bourrichon.fr.
  15. koiladatwntempwn.gr.
  16. « Horna / Peste Noire - Horna / Peste Noire - Encyclopaedia Metallum: The Metal Archives », sur www.metal-archives.com (consulté le ).
  17. letelegramme.fr.

Voir aussi


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Bibliographie



Articles connexes



Liens externes



На других языках


[en] Tristan Corbière

Tristan Corbière (18 July 1845 – 1 March 1875), born Édouard-Joachim Corbière, was a French poet born in Coat-Congar, Ploujean (now part of Morlaix) in Brittany, where he lived most of his life before dying of tuberculosis at the age of 29. He was a French poet, close to Symbolism, and a figure of the "cursed poet".[1]

[es] Tristan Corbière

Édouard-Joachim Corbière, llamado Tristan Corbière (Coat-Congar de comuna francesa, Morlaix (Finisterre), 18 de julio de 1845 – 1 de marzo de 1875, donde vivió la mayor parte de su vida y donde fallecería de tuberculosis a la edad de 29 años), fue un poeta cuyo trabajo fue poco conocido hasta que Paul Verlaine lo incluyó en su prosa poética de Los poetas malditos (poètes maudits).
- [fr] Tristan Corbière

[ru] Корбьер, Тристан

Тристан Корбьер (фр. Tristan Corbière, Эдуард Жоакен Корбьер, настоящее имя Эдуар Жоашен, 18 июля 1845, Морле — 1 марта 1875, там же) — французский поэт-символист, представитель группы «прóклятых поэтов».



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