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René Char, né le à L'Isle-sur-la-Sorgue (Vaucluse) et mort le à Paris 5e, est un poète et résistant français.

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René Char
Biographie
Naissance

L'Isle-sur-la-Sorgue (Vaucluse, France)
Décès
(à 80 ans)
5e arrondissement de Paris (Paris)
Nationalité
Française
Activités
Poète, résistant, écrivain, dramaturge
Période d'activité
-
Père
Émile Char (d)
Conjoints
Tina Jolas
Marie-Claude Char
Autres informations
Membre de
Académie bavaroise des beaux-arts
Genre artistique
Poésie lyrique (en)
Distinction
Les cent livres du siècle
Archives conservées par
Bibliothèque cantonale et universitaire de Lausanne, service des Manuscrits (d) (IS 5860)[1]
Bibliothèque cantonale et universitaire de Lausanne, service des Manuscrits (d) (IS 5862)[2]
Signature

Biographie



1907-1929


René Émile Char est le benjamin des quatre enfants issus des secondes noces, en 1888, de Joseph, Emile, Magne Char (1863-1918), négociant né à L’Isle-sur-la-Sorgue, et de Marie-Thérèse, Armande Rouget (1869-1951), sœur de sa première épouse, Julia Rouget, morte en 1886 de tuberculose un an après leur mariage. À la naissance de René Char, ses sœurs, Julia (1889-1965) et Émilienne (1900-1978), ont dix-huit et sept ans, son frère Albert en a quatorze.

Son grand-père paternel, Magne Albert Char, dit Charlemagne, enfant naturel et abandonné né en 1826 à Avignon, placé dans une ferme du Thor puis plâtrier à L’Isle-sur-la-Sorgue, avait épousé en 1858 Joséphine Élisabeth Arnaud, fille de meunier. Son grand-père maternel, Joseph Marius Rouget, maçon, avait en 1864 épousé Joséphine Thérèse Chevalier, née en 1842 à Cavaillon.

Société Char&Cie, courrier de 1897.
Société Char&Cie, courrier de 1897.

Son père Joseph Émile Magne Char, qui a abrégé son nom, est maire de L’Isle-sur-la-Sorgue à partir de 1905 et devient en 1907 administrateur délégué des plâtrières de Vaucluse. René Char passe son enfance aux « Névons », vaste demeure familiale dont la construction au milieu d'un parc venait d'être achevée à sa naissance, et où logent également ses grands-parents Rouget. Il bénéficie de l'affection de son père, et il est attaché à sa grand-mère maternelle, à sa sœur Julia, à sa marraine Louise Roze et sa sœur Adèle, qui habitent une vaste maison au centre de la ville, mais subit le rejet hostile de sa mère, catholique pratiquante opposée aux idées politiques de son mari, et de son frère. La famille passe l'été dans une autre de ses propriétés, La Parellie, entre L'Isle et La Roque-sur-Pernes.

En 1913, René Char entre à l'école. Mordu en 1917 par son chien enragé, il est l'un des premiers à recevoir à l'hôpital de Marseille le vaccin mis au point par Pasteur. Après la mort de son père, le , d'un cancer du poumon, les conditions matérielles d’existence de la famille deviennent précaires. René Char se lie vers 1921 avec Louis Curel, cantonnier, admirateur de la Commune de Paris, et membre du Parti communiste, qu'il dépeindra sous le nom d'Auguste Abondance dans Le Soleil des eaux, son fils Francis, élagueur, Jean-Pancrace Nougier, dit l'Armurier (il répare les vieux fusils), qu'il évoquera dans Le Poème pulvérisé, et qui sera lui aussi l'un des personnages du Soleil des eaux, les pêcheurs de la Sorgue, et quelques vagabonds au parler poétique qu'il nommera plus tard les Transparents.

Bâti comme un colosse (1,92 m) et impulsif, il joue passionnément au rugby, qu'il pratique avec son ami Jean Garcin. Interne à partir de 1918 au lycée Mistral d’Avignon, il décide en 1923 de le quitter, après une dispute avec l'un de ses professeurs qui se moque de ses premiers vers. Il fait en 1924 un voyage en Tunisie, où son père avait créé une petite plâtrerie, puis en 1925 suit les cours de l'École de commerce de Marseille, qui ne l'intéressent pas davantage. Il lit Plutarque, François Villon, Racine, les romantiques allemands, Alfred de Vigny, Gérard de Nerval et Charles Baudelaire, mais aussi, vraisemblablement, Rimbaud, Mallarmé et Lautréamont, peut-être des poèmes d'Éluard.

Après avoir travaillé à Cavaillon dans une maison d'expédition de fruits et légumes, il effectue en 1927 son service militaire dans l'artillerie à Nîmes, affecté à la bibliothèque des officiers. Il écrit alors une première critique, d'un roman d'André de Richaud, pour la revue parisienne Le Rouge et le Noir, à laquelle il collabore jusqu'en 1929. En 1928 est publié aux éditions de la revue, grâce à l'aide financière de sa grand-mère, qui meurt en décembre 1926, son premier recueil, dont il détruira la plus grande partie des 153 exemplaires, Les Cloches sur le cœur, rassemblant des poèmes écrits entre 1922 et 1926. Il publie également en revues un texte sur la ville d'Uzès en 1928 dans La Cigale uzégeoise, et en 1929 un poème ancien dans Le Feu d'Aix-en-Provence[3].


1929-1939


La Sorgue au Partage des eaux.
La Sorgue au Partage des eaux.

Au début de l'année 1929, René Char fonde à L'Isle-sur-la-Sorgue, aidé financièrement par le directeur de la maison d'expédition de Cavaillon où il avait travaillé, la revue Méridiens avec André Cayatte, rencontré lors de son service militaire. Elle connaîtra trois numéros de mai à décembre. Dans le deuxième il publie une lettre inédite du maire de Charenton sur la mort de Sade, trouvée dans la bibliothèque des sœurs Roze (où il découvrira également treize lettres inédites de Sade), ainsi qu'une nouvelle largement autobiographique, Acquis par la conscience. En septembre, il envoie l'un des vingt-six exemplaires hors commerce de son second recueil, Arsenal, publié en août à Nîmes, à Paul Éluard, qui vient lui rendre visite à l'automne à L’Isle-sur-la-Sorgue, où il passe trois semaines. À la fin novembre, René Char arrive à Paris, rencontre Louis Aragon, André Breton, René Crevel et leurs amis, adhère au groupe surréaliste au moment où Desnos, Prévert et Queneau le quittent, et publie en décembre Profession de foi du sujet dans le douzième numéro de La Révolution surréaliste. Durant quatre ans il va collaborer aux activités du mouvement, dont il est en 1931 et 1932 le trésorier.

Le les surréalistes saccagent à Paris le bar « Maldoror », lors d'une bagarre au cours de laquelle Char est blessé d'un coup de couteau dans l'aine. Il partage alors avec Éluard une vie libre et fastueuse, et c'est ensemble qu'ils rencontrent en « Nush » (Maria Benz), figurante sans travail et sans toit, qui vient habiter avec eux et épousera Éluard en 1934. Tandis qu'il lit les philosophes présocratiques et les grands alchimistes, Char publie une deuxième édition remaniée d'Arsenal, puis en avril 1930 à Nîmes Le Tombeau des secrets, douze photographies, dont un collage de Breton et d'Éluard, légendées par des poèmes. Paraît simultanément, imprimé à Nîmes Ralentir travaux (d'après un panneau rencontré sur la route de Caumont-sur-Durance), poèmes écrits entre le 25 et le 30 mars en collaboration par Breton, Char et Éluard à Avignon et dans le Vaucluse et L'action de la justice est éteinte en .

Aragon, Breton, Char et Éluard fondent en la revue Le Surréalisme au service de la révolution. Char revient régulièrement en Provence, durant l'été près de Cannes, et avec Nush et Éluard s'embarque à Marseille, faisant escale à Barcelone pour séjourner à Cadaqués chez Salvador Dalí et Gala[4]. Ses poèmes d'Artine paraissent en novembre aux Éditions surréalistes, chez José Corti, avec une gravure de Dalí. En février 1931 Éluard lui rend à nouveau visite à L'Isle avec Jean et Valentine Hugo, et ils visitent Ménerbes et Gordes, Lacoste et Saumane dont les deux châteaux appartenaient à la famille du marquis de Sade. Char signe en 1931 les tracts surréalistes concernant le film L'Âge d'or (réalisé par Dalí et Buñuel, et attaqué par les ligues de droite) et la situation politique en Espagne. Avec plusieurs amis écrivains (Louis Aragon, André Breton, Paul Éluard, etc), il attaque frontalement l’Exposition coloniale de 1931, qu'ils décrivent comme un « carnaval de squelettes », destiné à « donner aux citoyens de la métropole la conscience de propriétaires qu’il leur faudra pour entendre sans broncher l’écho des fusillades ». Ils réclament également « l’évacuation immédiate des colonies », et la tenue d'un procès sur les crimes commis[5].

L'héritage qu'il a reçu de son père dilapidé, Char loge en 1932 rue Becquerel, dans l'appartement aménagé par Éluard pour Gala tandis qu'elle le quittait pour Dalí. Pendant l'été il voyage en Espagne avec Francis Curel, puis rencontre sur la plage de Juan-les-Pins Georgette Goldstein, qu'il épouse à Paris en octobre 1932, Éluard étant l'un des témoins. En , Char séjourne brièvement à Berlin avec Éluard et signe en mars un tract antifasciste. De juin à le couple s'installe à Saumane. Durant l'hiver Char revient à L'Isle, loue au début de 1934 un appartement à Paris, rue de la Convention, séjourne en février au Cannet, rentre à L'Isle en avril, puis surveille à Paris, avec Georgette, l'édition chez José Corti, à 500 exemplaires, du Marteau sans maître, refusé par Gallimard, illustré d'une gravure donnée par Kandinsky. Au mariage d'Éluard, le , Breton est son témoin, Char celui de Nush.

Char se détache à partir de du groupe surréaliste : « Le surréalisme est mort du sectarisme imbécile de ses adeptes », écrit-il dans une lettre à Antonin Artaud. Il demeure principalement à L'Isle l'année suivante mais va en février retrouver en Suisse Éluard et Crevel, au sanatorium de Davos. En avril il accueille Tzara et sa femme Greta Knutson à L'Isle, et les rejoint avec Éluard à Nice en septembre. Dans une lettre ouverte à Péret, il confirme le  :

« J'ai repris ma liberté voici treize mois, sans éprouver en revanche le besoin de cracher sur ce qui durant cinq ans avait été pour moi tout au monde[6]. »

Immeuble de René Char, rue des Artistes à Paris.
Immeuble de René Char, rue des Artistes à Paris.

Renonçant à son appartement parisien en il s'installe avec Georgette à L'Isle, et est nommé en avril administrateur délégué de la société des Plâtrières du Vaucluse qu'avait dirigée son père, fonction qu'une septicémie le contraint rapidement à ne pas assumer, et à laquelle il renoncera en . Pendant sa convalescence, qui dure plus d'un an, il lit dans la bibliothèque des sœurs Roze des ouvrages de D'Alembert, D'Holbach, Helvétius. Éluard et Man Ray viennent à L'Isle aider Char pour la préparation de Dépendance de l'adieu - avec un dessin de Picasso, qu'Éluard lui avait fait rencontrer - publié en mai par GLM à 70 exemplaires. À la fin du mois d'août, Char s'installe pour quelques semaines à Céreste, où il se lie avec maître Roux et ses quatre fils, puis séjourne au Cannet. En décembre GLM édite, avec l'aide financière d'Éluard, Moulin premier, à 120 exemplaires [7]. Éluard et Nush lui rendent visite au Cannet en janvier 1937. En août Char reçoit, avec Georgette à Céreste, le couple de surréalistes belges Louis Scutenaire et Irène Hamoir, dont il s'éprend[8], et qu'il va rejoindre en septembre à La Haye où elle travaille à la Cour internationale de justice, liaison rapidement interrompue par son mari. À la fin de l'année il s'installe à nouveau avec Georgette à Paris, rue des Artistes. Placard pour un chemin des écoliers, édité en décembre, est dédié aux enfants victimes de la guerre d'Espagne. À travers sa correspondance avec Gilbert Lely, rencontré en 1934, naît une amitié qui se renforce l'année suivante lors de leurs promenades à Paris au square Saint-Lambert, puis traversera les années de guerre. Dès février 1938 Char propose à Christian Zervos ses premiers écrits sur les peintres, Corot et Courbet. Cette même année, il s'éprend d'une passion amoureuse, qui durera jusqu'en 1944, pour Greta Knutson, peintre d'origine suédoise, de huit ans son aînée, séparée depuis l'année précédente de son mari Tristan Tzara, passe avec elle le mois d'août dans le Luberon à Maubec, où il commence d'écrire les poèmes, imprégnés de sa présence, du Visage nuptial. Avec Greta Knutson il découvre le romantisme allemand, et particulièrement Hölderlin, ainsi que la philosophie de Heidegger. En septembre il est mobilisé à Paris pour une dizaine de jours, puis en 1939 à Nîmes comme simple soldat[9].


1939-1945


René Char (1941).
René Char (1941).
Cachet Section Atterrissage Parachutage.
Cachet Section Atterrissage Parachutage.

Pendant l’Occupation, René Char, sous le nom de « Capitaine Alexandre »[10], participe, les armes à la main, à la Résistance, « école de douleur et d’espérance ». Il commande la section atterrissage parachutage de la zone Durance. Son QG est installé à Céreste (Basses-Alpes).

« Les Feuillets d’Hypnos (repris en volume dans Fureur et Mystère), ses notes du maquis], sont calculés pour restituer l'image d'une certaine activité, d'une certaine conception de la Résistance et, d'abord, d'un certain individu avec sa multiplicité interne, ses alternances et aussi sa différence, qu'il est moins disposé que jamais à oublier […] L'apparence fragmentaire du récit montre l'allergie de René à toute rhétorique, à ces transitions, introductions et explications qui sont le tissu intercalaire de tout corps de récit normalement constitué ; ne subsistent, séparées, que les parties vives, ce qui donne aux Feuillets un faux air de recueil d'aphorismes ou de journal intime, alors que la composition d'ensemble et même les annotations sont très calculées […] L'ensemble demeure une des images les moins convenues et les plus approfondies de ce que fut la résistance européenne au nazisme. »

 Paul Veyne, René Char en ses poèmes

Le cabanon de René Char à Céreste et le village, en 1941, avec la mention autographe :
«Le village de Céreste, au temps des monts enragés et de l'amitié fantastique

À ce recueil capital, il convient d'adjoindre les Billets à Francis Curel, datés des années 1941 à 1948 et recueillis dans Recherche de la base et du sommet. Compléments indispensables à la lecture des Feuillets d'Hypnos, ces documents éclairent de l'intérieur cette expérience fondatrice que fut pour Char celle de la Résistance : refus de publier durant l'Occupation, dénonciation du nazisme et de la collaboration française, interrogations aiguës et douloureuses sur son action et ses missions, prise de distance sitôt la guerre terminée.

« Dissident dans l’âme et homme de principes, Char finit par devenir un rebelle chez les rebelles, puis un rebelle chez les subordonnés lors de sa seconde expérience de l’armée. Il est la figure de l’insurgé, qui lutte contre les dogmatismes, les formatages, ou la passivité face à l’atroce. L’occupation lui offre cruellement la possibilité de devenir concrètement ce qu’il a toujours été : un résistant »[11].

La Médaille de la Résistance lui a été attribuée le 6 septembre 1945[12].

Enfin, c'est en , à Paris, que René Char et Yves Battistini se rencontrent. Entre eux, « c’est le début en amitié d’une longue conversation souveraine » avec la philosophie grecque et la poésie.


1946-1988


Rue de Chanaleilles, 4, où habitèrent René Char et Albert Camus.
Rue de Chanaleilles, 4, où habitèrent René Char et Albert Camus.
Rue de Chanaleilles, 4, plaque commémorative de René Char.
Rue de Chanaleilles, 4, plaque commémorative de René Char.
Signature autographe de René Char à Roger Vailland.
Signature autographe de René Char à Roger Vailland.

L'après-guerre laissera Char profondément pessimiste quant à la situation politique française et internationale jusqu'à la fin de sa vie, comme en témoignent À une sérénité crispée et L’Âge cassant (repris en volume dans Recherche de la base et du sommet). Sous ce rapport, ses vues très lucides sont proches de celles d'Albert Camus dans L'Homme révolté, avec qui il entretiendra une indéfectible amitié.

Dans le cadre d'une exposition d'art moderne qu'ils organisent dans la grande chapelle du Palais des papes d'Avignon, Christian Zervos et René Char demandent à Jean Vilar, acteur, metteur en scène et directeur de théâtre, une représentation de Meurtre dans la cathédrale, qu'il a créé en 1945.

Après avoir refusé, Vilar leur propose en 1947 trois créations : La Tragédie du roi Richard II, de Shakespeare, une pièce méconnue en France, La Terrasse de midi, de Maurice Clavel, auteur alors encore inconnu, et L'Histoire de Tobie et de Sara, de Paul Claudel[13]. C'est la naissance du Festival d'Avignon.

Le , il divorce de Georgette Goldstein[14].

De 1957 à 1987, René Char vit une immense passion amoureuse avec l'anthropologue Tina Jolas.

Durant les années 1950 et 1960, en dépit de brèves et malheureuses expériences dans le domaine théâtral et cinématographique, Char atteint sa pleine maturité poétique. Les plaquettes se succèdent : Les Matinaux, La Bibliothèque est en Feu, Lettera amorosa, Retour Amont (repris en volumes dans La Parole en Archipel et Le Nu perdu). Il éprouve également le besoin de rendre hommage aux poètes et aux peintres qui l'ont accompagné et nourri, ceux qu'il nomme ses « grands astreignants » et ses « alliés substantiels » (Recherche de la base et du sommet).

Malgré son refus de toute forme de littérature engagée, René Char participe activement en 1966 aux manifestations contre l'installation des missiles à tête nucléaire sur le plateau d'Albion.

Outre la publication de quelques recueils d'importance, tels La Nuit talismanique qui brillait dans son cercle, Aromates Chasseurs et Chants de la Ballandrane, les deux dernières décennies voient la consécration officielle de la figure solitaire de René Char, symbolisée par la publication d'un Cahier de l'Herne en 1971 et celle de ses Œuvres complètes dans la Bibliothèque de la Pléiade, en 1983.

Il est membre de la Légion d'honneur[15].

En octobre 1987, il épouse Marie-Claude de Saint-Seine, une éditrice.

Il meurt d'une crise cardiaque, le dans le 5e arrondissement de Paris[16]. Il est inhumé au cimetière communal de L'Isle-sur-la-Sorgue, dans le caveau familial[17].


Postérité


L’hôtel Campredon ou « maison René Char » à L’Isle-sur-la-Sorgue propose au public, à partir de 1982[18], une collection de manuscrits, dessins, peintures et objets d’art ayant appartenu à René Char jusqu'en [19],[20]. Depuis lors, cette situation pose avec acuité la question de la pérennité de l'œuvre du poète dans la ville et la recherche d'une nouvelle géographie de la mémoire[21].

Une partie des archives et manuscrits de l'auteur est conservé à la Bibliothèque littéraire Jacques Doucet grâce à de multiples donations dont celle de Marie-Claude Char.

La place René-Char (Paris) est baptisée en son honneur.

La Bibliothèque des Lettres et Sciences humaines et sociales de l'Ecole Normale Supérieure a proposé en 2022 une exposition, Commune présence, sur le thème de la visite au poète : étaient présentés des ouvrages dédicacés à la Bibliothèque des Lettres et à Paul Veyne, des éditions originales, des archives photographiques et des extraits de correspondance datés des vingt dernières années de la vie de René Char. En effet, de nombreux jeunes chercheurs ou futurs écrivains, normaliens ou non, se sont rendus à L'Isle-sur-la-Sorgue pour rencontrer René Char et ont été durablement marqués par cette rencontre : de Paul Veyne à Bertrand Marchal et Danièle Leclair, sans oublier Jean-Claude Mathieu, de Paul Celan à Claude Esteban, Dominique Fourcade ou Florence Delay, entre autres[22].


L'œuvre


Signature de René Char.
Signature de René Char.

Maurice Blanchot, dans La Part du feu, observait que « l'une des grandeurs de René Char, celle par laquelle il n'a pas d'égal en ce temps, c'est que sa poésie est révélation de la poésie, poésie de la poésie. » Ainsi, dans toute l'œuvre de Char, « l'expression poétique est la poésie mise en face d'elle-même et rendue visible, dans son essence, à travers les mots qui la recherchent. » Il est hautement significatif que Char ait recueilli et publié une anthologie plusieurs fois augmentée de tout ce qui a trait explicitement dans son œuvre à la parole poétique : Sur la poésie. Sur le plan formel, sa poésie trouve son expression privilégiée dans l'aphorisme, le vers aphoristique, le fragment, le poème en prose (ce que Char nomme sa parole en archipel), si tant est que ces catégories littéraires soient pertinentes.

Dans L'Entretien infini, Blanchot se penche longuement sur cette question :

« La parole de fragment n'est jamais écrite en vue de l'unité, même le serait-elle. Elle n'est pas écrite en raison ni en vue de l'unité. Prise en elle-même, en effet, elle apparaît dans sa brisure, avec ses arêtes tranchantes, comme un bloc auquel rien ne semble pouvoir s'agréger. Morceau de météore, détaché d'un ciel inconnu, et impossible à rattacher à rien qui puisse se connaître. Ainsi dit-on de René Char qu'il emploie la « forme aphoristique ». Étrange malentendu. L'aphorisme est fermé et borné : l'horizontal de tout horizon. Or, ce qui est important, important et exaltant, dans la suite de « phrases » presque séparées que tant de ses poèmes nous proposent - textes sans prétexte, sans contexte -, c'est que, interrompues par un blanc, isolées et dissociées au point que l'on ne peut passer de l'une à l'autre ou seulement par un saut et en prenant conscience d'un difficile intervalle, elles portent cependant, dans leur pluralité, le sens d'un arrangement qu'elles confient à un avenir de parole […] Qu'on entende que le poète ne joue nullement avec le désordre, car l'incohérence ne sait que trop bien composer, fût-ce à rebours. Ici, il y a la ferme alliance d'une rigueur et d'un neutre. Les « phrases » de René Char, îles de sens, sont, plutôt que coordonnées, posées les unes auprès des autres : d'une puissante stabilité, comme les grandes pierres des temples égyptiens qui tiennent debout sans lien, d'une compacité extrême et toutefois capables d'une dérive infinie, délivrant une possibilité fugace, destinant le plus lourd au plus léger, le plus abrupt au plus tendre, comme le plus abstrait au plus vivace (la jeunesse du visage matinal). »

Albert Camus.
Albert Camus.

Dans sa préface à l'édition allemande des Poésies de Char, parue en 1959[23], Albert Camus écrit :

« Je tiens René Char pour notre plus grand poète vivant et Fureur et Mystère pour ce que la poésie française nous a donné de plus surprenant depuis Les Illuminations et Alcools […] La nouveauté de Char est éclatante, en effet. Il est sans doute passé par le surréalisme, mais il s'y est prêté plutôt que donné, le temps d'apercevoir que son pas était mieux assuré quand il marchait seul. Dès la parution de Seuls demeurent, une poignée de poèmes suffirent en tout cas à faire lever sur notre poésie un vent libre et vierge. Après tant d'années où nos poètes, voués d'abord à la fabrication de « bibelots d'inanité », n'avaient lâché le luth que pour emboucher le clairon, la poésie devenait bûcher salubre. […] L'homme et l'artiste, qui marchent du même pas, se sont trempés hier dans la lutte contre le totalitarisme hitlérien, aujourd'hui dans la dénonciation des nihilismes contraires et complices qui déchirent notre monde. […] Poète de la révolte et de la liberté, il n'a jamais accepté la complaisance, ni confondu, selon son expression, la révolte avec l'humeur […] Sans l'avoir voulu, et seulement pour n'avoir rien refusé de son temps, Char fait plus alors que nous exprimer : il est aussi le poète de nos lendemains. Il rassemble, quoique solitaire, et à l'admiration qu'il suscite se mêle cette grande chaleur fraternelle où les hommes portent leurs meilleurs fruits. Soyons-en sûrs, c'est à des œuvres comme celle-ci que nous pourrons désormais demander recours et clairvoyance. »

René Char appartient à ces écrivains qui ont puisé certaines forces créatrices dans la peinture[24], il se passionne pour l'œuvre de Georges de La Tour. Il consacre à certains tableaux des textes poétiques dans Fureur et Mystère et Le Nu perdu où le lien entre stylistique et œuvre picturale est exacerbé.


Œuvres


 : document utilisé comme source pour la rédaction de cet article.


Recueils poétiques


Recueils publiés dans la collection "Poésie Gallimard" :


Divers



Anthologies



Œuvres complètes



Correspondance



Ventes aux enchères



Archives



Notes et références



Notes



    Références


    1. « https://patrinum.ch/record/173629 » (consulté le )
    2. « https://www.patrinum.ch/record/174956 » (consulté le )
    3. Tous éléments biographiques extraits de René Char, Œuvres complètes, éditions Gallimard, Bibliothèque de la Pléiade, Paris, 1983, p. LXIII-LXVI, et Danièle Leclair, René Char. Là où brûle la poésie, Éditions Aden, 2007, p. 17-62..
    4. En 1930 selon Danièle Leclair, dans René Char. Là où brûle la poésie, qui corrige, à partir des Lettres à Gala d'Éluard, la date, 1931, indiquée dans René Char, Œuvres complètes, éditions Gallimard, Bibliothèque de la Pléiade, Paris, 1983.
    5. « Paul Éluard Faire face aux bâtisseurs de ruines », sur L'Humanité,
    6. Dans l'atelier du poète, p. 127.
    7. GLM éditera près de 25 œuvres de René Char entre 1936 et 1974
    8. « Du torrent épars de la vie arrêtée j'avais extrait la signification loyale d'Irène. La beauté déferlait de sa gaine fantasque, donnait des roses aux fontaines », écrit alors Char dans un poème, Allègement, publié dans Seuls demeurent (Œuvres complètes, éditions Gallimard, Bibliothèque de la Pléiade, Paris, 1983, p. 134).
    9. Tous éléments biographiques extraits de René Char, Œuvres complètes, éditions Gallimard, Bibliothèque de la Pléiade, Paris, 1983, p. LXVII-LXXI, Danièle Leclair, René Char. Là où brûle la poésie, Éditions Aden, 2007, p. 63-131, et Georges-Louis Roux, La Nuit d'Alexandre, René Char, l'ami et le résistant, Grasset, 2003, p. 46, 47 et 55.
    10. Richard Seiler, « René Char, 'Capitaine Alexandre', « 'Hypnos' », in 39-45, no 230, janvier 2006
    11. « Portrait d'un poète résistant : René Char », sur archives-lepost.huffingtonpost.fr (consulté le )
    12. « Cf. site de L'Ordre de la Libération »
    13. « Histoire », sur le Site du festival d'Avignon.
    14. Rosemary Lancaster, La poésie éclatée de René Char, Amsterdam, Rodopi, (lire en ligne), p. 209.
    15. « Portraits de décorés: René Char », sur legiondhonneur.fr (consulté le )
    16. Insee, « Extrait de l'acte de décès de René Émile Char », sur MatchID
    17. Philippe Landru, « L’ISLE-SUR-LA-SORGUE (84) : cimetière », sur Cimetières de France et d'ailleurs (consulté le )
    18. « Le musée René Char à l'Isle sur Sorgue », sur Sudorama, mémoires du Sud de 1940 à nos jours (consulté le )
    19. « Menaces sur la Maison René-Char à L'Isle-sur-la-Sorgue », sur L'Humanité, (consulté le )
    20. « La maison René Char fait débat à l'Isle sur la Sorgue », sur Franceinfo, (consulté le )
    21. « les Amis de René Char ».
    22. « René Char. Commune présence | Rubens, exposition conçue par Marie Frisson », sur bib.ens.psl.eu (consulté le )
    23. Dichtungen, Fischer Verlag, Francfort, traductions par Paul Celan, Johannes Hübner, Lothar Klüner et Jean-Pierre Wilhem.
    24. Daniel Bergez, Littérature et peinture, Paris, Armand Colin, .
    25. Louis Broder, éditeur, Paris. Cité dans Lam et les poètes, Hazan, Paris, 2005, p. 98 et 102.
    26. Voir en ligne
    27. Voir en ligne
    28. Maison René Char

    Voir aussi


    Sur les autres projets Wikimedia :


    Bibliographie



    Filmographie



    Musique


    L’œuvre de René Char a suscité des compositions de Pierre Boulez, Le Visage Nuptial (1946) et Le Marteau sans Maître (1954), un ballet de Maurice Béjart en 1973 et un ballet de Richard Alston en 1993. Strophe pour soprano et orchestre de Gilbert Amy (1965-1967).


    Articles connexes



    Liens externes



    Bases de données et dictionnaires


    На других языках


    [en] René Char

    René Émile Char (French: [ʃaʁ]; 14 June 1907 – 19 February 1988) was a French poet and member of the French Resistance.

    [es] René Char

    René Char (L'Isle-sur-la-Sorgue, Vaucluse, 14 de junio de 1907, París - 19 de febrero de 1988) fue un poeta francés del siglo XX y miembro de la resistencia francesa.
    - [fr] René Char

    [ru] Шар, Рене

    Рене́ Шар (фр. René Char; 14 июня 1907 года, Л’Иль-сюр-ла-Сорг, департамент Воклюз — 19 февраля 1988 года, Париж) — французский поэт, один из крупнейших лириков XX века.



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